Publié le 31 mai 2025Lecture 7 min
Prise en charge du TDAH : recommandations de la HAS
Martine LE ROCH, Vertou

Le TDAH concerne 5 à 7 % des enfants d’une classe d’âge, soit 2 à 3 enfants par classe. Devant l'importance de la population concernée par ce trouble, les pédiatres doivent être capables de proposer une prise en charge à leur patient. Nous aborderons les aspects non médicamenteux de cette prise en charge, puis ce qu’il faut savoir sur la prescription de méthylphénidate. Et enfin, nous terminerons par la place de la Maison départementale pour les personnes handicapées (MDPH) dans la prise en charge de ce trouble.
La prise en charge non médicamenteuse
En premier lieu, des conseils généraux peuvent être donnés. Il faut souligner l’importance d’une bonne hygiène de sommeil, avec des rituels, des heures de coucher régulières. Près de deux tiers des enfants ayant un TDAH ont un retard de phase de sécrétion de mélatonine. Il est possible de leur prescrire de la mélatonine en libération immédiate à prendre au coucher, sous forme de préparation magistrale. Il sera également important de vérifier l’absence de syndrome d'apnées du sommeil (qui nécessiterait un avis ORL pour questionner une amygdalectomie ou adénoïdectomie) et de syndrome des jambes sans repos (qui ferait rechercher une carence martiale).
Il faut insister sur l’importance d’une ” alimentation équilibrée, les enfants ayant un TDAH étant plus à risque de surpoids, et également sur l’importance de pratiquer une activité physique intensive au moins 3 fois par semaine.
Il faudra également donner des conseils sur la régulation de l’utilisation des écrans.
La psychoéducation de l’enfant, mais également de sa famille, est indispensable. Cela peut être débuté par le pédiatre et approfondi par les professionnels rééducateurs (psychologue, ergothérapeute, psychomotricien, etc.).
On pourra proposer des thérapies cognitivo-comportementales et émotionnelles (par les psychologues), afin d’aider à la gestion des émotions.
Chez les enfants plus jeunes, un accompagnement en psychomotricité pour la régulation tonico-émotionnelle pourra être intéressant à proposer, même si le diagnostic n’est pas encore validé.
Les enfants ayant un TDAH sont sujets à de nombreuses maladresses relationnelles, pour lesquelles un suivi en groupe d’habiletés sociales pourra être envisagé.
Il n’y a pas de place pour les thérapies de type analytique, neurofeed-back, pleine conscience, etc.
Spécifiquement pour les parents, il est possible de proposer des groupes d’entraînement aux habiletés parentales, ceux de type Barkley étant les plus développées en France. Cet accompagnement leur donnera des outils pour la gestion du quotidien, et pourra être proposé avant même la formalisation du diagnostic.
Il conviendra également que l’école mette en place des adaptations pédagogiques qui pourront être formalisées via un PPRE (programme personnalisé de réussite éducative), que la demande vienne de l’enseignant via un PAP (plan d’accompagnement personnalisé) si cela est proposé par le médecin scolaire ou via un PPS (projet personnalisé de scolarisation) et que l'initiative émane de la MDPH. Dans ces adaptations, on peut proposer de placer l’enfant au 1er rang, de le recentrer régulièrement dans la tâche, de lui donner les consignes une par une, de l’aider à s’organiser, d’autoriser des outils type fidget, coussin à picots, élastique pour les pieds lui permettant de bouger sans gêner la classe. Pour les examens, il faut prévoir des pauses avec temps compensatoire pendant les épreuves, et un passage en priorité pour les oraux.
La prise en charge médicamenteuse
Le seul traitement ayant l’autorisation de mise sur le marché (AMM) en France est le méthylphénidate. Il s’agit d’un psychostimulant mais qui n’agit pas de la même façon qu’une amphétamine. Le méthylphénidate inhibe la recapture de la dopamine, à l’inverse des amphétamines qui en libèrent davantage dans la fente synaptique.
Le méthylphénidate est considéré comme un stupéfiant et doit donc se prescrire sur ordonnance sécurisée pour 28 jours. Le médecin spécialiste, pédiatre ou psychiatre, initie le traitement et le renouvelle annuellement, et le médecin traitant assure les renouvellements mensuels.
L’AMM du méthylphénidate n’est qu’au-delà de 6 ans. Il est nécessaire d’avoir l’accord des deux parents pour l’initier.
Les récentes études ont montré que la prise de ce traitement permet de réduire le risque de tomber dans les addictions à l’adolescence, risque qui est majoré chez les enfants TDAH.
Ce traitement est proposé d’emblée en cas de forme sévère ou en seconde intention en cas d’échec des mesures non médicamenteuses seules. Il est complémentaire des mesures non médicamenteuses.
Avant de débuter le traitement, il faut s’assurer de l’absence de pathologie cardiovasculaire en éliminant des antécédents de mort subite ou de trouble du rythme dans la famille (faire un ECG en cas de doute), et en mesurant la fréquence cardiaque (FC) et la tension artérielle (TA), ainsi que le poids et la taille. Ces quatre paramètres sont à surveiller à chaque renouvellement de prescription.
Le traitement est initié avec une forme à libération prolongée. On augmente ensuite progressivement les posologies sur plusieurs semaines, en débutant à 0,3 mg/kg/j pour arriver jusqu’à 1 mg/kg/j. L’enfant sera revu pour juger du palier le plus efficace et avec le moins d’effet secondaire. Il existe quatre formes à libération prolongée (tableau 1).
Le médicament se prend au milieu du petit déjeuner. Il est possible d’ouvrir la gélule sans croquer les microbilles, car cela risquerait d’inactiver la forme prolongée.
Il n’est pas possible de prévoir à l’avance, la posologie idéale pour un enfant donné, ni la tolérance.
En cas de mauvaise tolérance, il faut proposer un changement de forme.
Parmi les effets secondaires les plus fréquents, on trouvera la perte d’appétit le midi (nécessitant de prendre un petit déjeuner copieux et de prévoir un dîner plus important que d’ordinaire) et des difficultés d’endormissement. Des douleurs abdominales ou des céphalées peuvent apparaître au début du traitement, et s’améliorer après quelques jours, voire quelques semaines.
La prise de méthylphénidate peut également faire apparaître, chez des enfants qui parvenaient à les maîtriser auparavant, des signes d’anxiété comme des tics. Il est recommandé, chez les enfants anxieux ou ayant un TSA, de faire une augmentation des posologies plus progressive.
Une grande tristesse, une apathie, ou des pleurs très fréquents sont des signes de surdosage et doivent faire diminuer la posologie.
En cas de retentissement important sur l’appétit, entraînant un ralentissement de la croissance pondérale, il conviendra de faire des pauses le week-end et pendant les vacances, et de proposer des collations en journée.
En cas de difficultés d’endormissement, on peut proposer une prise de mélatonine à libération immédiate au coucher (ou monter les doses chez ceux l'utilisant déjà). Certains enfants peuvent présenter un « effet fin de dose », avec un regain d’hyperactivité et d’impulsivité au moment de la fin de l’action du méthylphénidate, qui correspond à l'heure du retour à la maison après l'école. Cela peut être très difficile à vivre pour certaines familles, dans ce cas, de la Ritaline® en libération immédiate (sous forme de comprimé de 10 mg, sécable) peut être prescrite, pour avoir une action thérapeutique jusqu’au coucher (tableau 2).
Le dossier MDPH
La mise en place d’un dossier MDPH n’a rien d’automatique pour un enfant ayant un TDAH. Cela dépend du retentissement fonctionnel du trouble.
Trois types de compensations peuvent être proposés :
– les compensations scolaires : des adaptations pédagogiques notifiées dans le cadre du PPS (projet personnalisé de scolarisation) ; une aide humaine (« AESH » ac compagnant de l’élève en situation de handicap, nommée par l’Éducation nationale), qu'il est possible de demander pour assister l’élève dans la classe et l’aider à se concentrer, s’organiser. Si malgré ces aides, l’enfant est toujours en échec scolaire, il pourra être nécessaire de demander une orientation en classe ULIS (unités localisées pour l'inclusion scolaire) ;
– les compensations rééducatives : en cas de nécessité de suivi multidisciplinaire, ce qui est fréquent, notamment chez les enfants ayant des comorbidités associées, on pourra demander un SESSAD (service d’éducation spéciale et de soins à domicile). Les soins seront pris en charge financièrement et les professionnels viendront les assurer sur le lieu de vie de l’enfant (maison, école) ;
– les compensations matérielles : matériel pédagogique adapté (ordinateur, souris scanner, etc.) et/ou allocation financière AEEH (allocation éducation enfant handicapé, versée par la CAF) qui est possible si l’enfant est reconnu handicapé à plus de 50 %.
On retiendra que la prise en charge d’un TDAH comprend plusieurs volets, tous complémentaires les uns des autres, et l’ensemble de ces propositions devront être reconsidérées au fur et à mesure que l’enfant grandit.
Pour en savoir plus :
• Trouble du neurodéveloppement/TDAH : Diagnostic et interventions thérapeutiques auprès des enfants et adolescents, juillet 2024.
• https://sommeilenfant.reseau-morphee.fr/2020/05/15/echelles-de-depistage-destroubles-du-sommeil-de-lenfant.
• https://www.monparcourshandicap.gouv.fr/scolarite/ppre-pai-pap-ppsen-quoi-consistent-les-differentespossibilites-dappui-la-scolarisation.
• https://www.tdah-france.fr/. Fiches pratiques CléPsy, mises à disposition par le service de psychiatrie de l’enfant et l’adolescent de l’hôpital Robert Debré (AP-HP).
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