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Pédiatrie générale

Publié le 06 mar 2022Lecture 7 min

Bourse aiguë de l’enfant et de l’adolescent

Philippe RAVASSE, Professeur émérite de chirurgie pédiatrique, Université de Caen Normandie

La bourse aiguë de l’enfant et de l’adolescent est une situation dont l’approche diagnostique est toujours une urgence, centrée sur une réflexion avant tout clinique dont l’objectif prioritaire est la préservation de la vitalité du testicule potentiellement menacée par deux accidents : la torsion du cordon spermatique principalement chez le grand enfant, la hernie étranglée chez le nourrisson.

A propos de l’ischémie du testicule et de ses conséquences, rappelons que si classiquement on apprend que le risque d’atrophie du testicule impose une revascularisation dans les 6 premières heures, il faut garder à l’esprit que la disparition des cellules germinales débute bien avant et que toute minute d’ischémie du testicule est un risque d’altération de la fertilité ultérieure du patient. La présentation des différents tableaux cliniques qui suit sera faite en fonction de l’âge, les pathologies observées étant souvent assez spécifiques de certaines catégories d’âge. En maternité La torsion du cordon spermatique Accident périnatal qui peut s’observer jusqu’à 3 semaines de vie. • Le diagnostic est suspecté habituellement devant un hémi-scrotum inflammatoire et/ou la palpation d’un testicule augmenté de volume, de consistance très ferme. Le sauvetage du testicule par une intervention chirurgicale en urgence est toujours évoqué, mais en pratique le chirurgien, même s’il parvient à opérer très précocement après le diagnostic, retrouve toujours un testicule nécrosé. Dès lors la justification d’une intervention en urgence ne repose que sur l’intérêt éventuel d’une fixation du testicule controlatéral, mais il n’y a aucun consensus sur ce sujet. Le risque de torsion néonatale bilatérale est connu mais souvent synchrone, et par ailleurs le facteur de risque de torsion néonatale (torsion supra-vaginale) est différent anatomiquement du facteur prédisposant à la torsion « adulte » (torsion intra-vaginale). C’est un risque peu connu dont la prévention peut être bien améliorée par l’information des parents pour une prise en charge précoce des cryptorchidies (6-12 mois). Dans une étude multicentrique française récente(1), 72 % des patients victimes d’une torsion sur testicule non descendu se présentent au-delà de 6 heures et 73 % n’avaient pas été orientés vers une consultation de chirurgie pédiatrique à l’âge recommandé. Chez le nourrisson La hernie inguinale étranglée Accident parfois révélateur d’une hernie jusque-là méconnue, le tableau clinique est souvent caractéristique : chez un nourrisson qui pleure de façon inhabituelle, la présence d’une tuméfaction inguinale ou inguino-scrotale douloureuse, non expansive, non réductible vers la cavité abdominale signe le diagnostic. Dès lors la réduction est une urgence : 9 fois sur 10 une pression manuelle douce et prolongée sur le contenu de la hernie (taxis) permet sa réduction. Il est important de pouvoir s’aider de moyens antalgiques et de sédation. En cas d’échec, il faut recourir à une intervention chirurgicale en urgence. Le risque de nécrose testiculaire est important, c’est lui qui est le facteur pronostic le plus péjoratif, et souvent méconnu, des hernies étranglées du nourrisson. L’orchi-épididymite C’est une pathologie rare chez l’enfant, principalement observée dans la première année de la vie, parfois favorisée par une malformation de l’appareil urinaire, une malformation anorectale. Tableau clinique d’apparition brutale : une grosse bourse inflammatoire, dont le contenu est induré, douloureux chez un nourrisson parfois fébrile. Dans certains cas, une infection urinaire bactérienne est documentée sur l’ECBU ce qui justifie une antibiothérapie, dans les autres cas, surtout en l’absence de fièvre, l’antibiothérapie peut ne pas être systématique, une étiologie virale n’étant pas rare en pédiatrie. Attention : chez les grands enfants, la présence d’un épididyme augmenté de volume en échographie fait porter très souvent à tort le diagnostic d’épididymite alors qu’il s’agit d’un signe très évocateur d’une torsion du cordon débutante ou spontanément résolutive. Petite et moyenne enfance L’œdème aigu idiopathique du scrotum Rare, âge moyen 5-6 ans, c’est une inflammation soudaine du tissu sous-cutané du scrotum pouvant s’étendre vers la région inguinale, la marge anale (figure 1). Le testicule sous-jacent est normal, non douloureux. L’évolution est spontanément favorable en 2-3 jours, la récidive est possible(2). La torsion d’hydatide testiculaire Fréquemment observée, préférentiellement chez des garçons de 6 à 10 ans. Douleur scrotale aiguë dont l’étiologie peut être affirmée avec certitude lorsque l’on trouve une douleur élective au pôle supérieur du testicule avec parfois une tuméfaction bleutée visible (figure 2). Si l’enfant est vu plus tardivement, les signes locaux inflammatoires avec éventuelle hydrocèle réactionnelle rendent le diagnostic clinique plus difficile. Le traitement médical symptomatique par antalgiques, anti-inflammatoires non stéroïdiens est le plus souvent suffisant, parfois cependant une intervention chirurgicale est justifiée soit en cas de doute diagnostique avec une torsion du cordon, soit en raison de la persistance de douleurs malgré le traitement médical (figure 2), la chirurgie apportera alors une disparition quasi immédiate des douleurs. Grand enfant, adolescent La torsion du cordon spermatique Le diagnostic qu’il ne faut pas manquer. Concerne plutôt les enfants au-delà de 10 ans, les adolescents, mais des enfants plus jeunes peuvent être cependant atteints. Les éléments du diagnostic sont bien connus de tous : douleur testiculaire de survenue brutale, très intense, irradiant volontiers dans la région inguinale accompagnée parfois de nausées ou de vomissement. Testicule ascensionné dans la bourse, exquisément douloureux, réflexe crémastérien souvent aboli. Mais, malheureusement, la proportion de testicules qui évoluera vers une atrophie reste toujours élevée (en moyenne 40 %), car en dehors des adolescents qui n’osent pas parler des symptômes à la phase précoce ce sont encore trop souvent les prises en charge médicales qui sont en cause : – méconnaissance des formes limitées aux seules douleurs de la fosse iliaque qui pour 80 % d’entre elles aboutissent à la perte du testicule(3) : rappelons que la palpation des testicules doit être systématique chez tout garçon ayant des douleurs abdominales sous-ombilicales ; – négligence des épisodes de douleurs spontanément résolutives que beaucoup de patients ont ressentis avant de faire une torsion plus complète ; – confiance bien trop aveugle des cliniciens envers l’échographie qui reste un examen difficile avec des opérateurs souvent peu entraînés surtout dans un contexte d’urgence. À propos de l’échographie En théorie, la certitude de l’absence de torsion n’est apportée que par la visualisation d’un cordon sans tour de spire sur toute sa longueur. L’examen du testicule seul comporte des pièges :  – l’hypovascularisation du testicule peut être faussement masquée par l’inflammation de ses enveloppes ; – l’augmentation de volume de l’épididyme à l’âge pédiatrique n’est pas secondaire à une épididymite, comme cela est trop fréquemment conclu, c’est bien plus souvent un œdème conséquence d’une torsion du cordon parfois résolutive ou de l’hydatide. C’est par conséquent avec une grande prudence que cette technique d’imagerie doit être utilisée, et rappelons : qu’elle ne doit pas générer de retard à la prise en charge ; que c’est au clinicien et non à l’échographiste qu’appartient la responsabilité du diagnostic qui sera retenu, mais en pratique on constate souvent que la conclusion apportée par l’échographiste est retenue sans débat entre les praticiens. La réalisation de l’échographie par le clinicien lui-même est une pratique intéressante pour réduire ces deux risques dans le cadre de l’urgence, mais elle reste très peu développée en France(4). Enfin, d’une façon générale, rappelons la nécessité d’un examen clinique complet qui permettra : – de reconnaître une orchite dans le cadre d’un purpura rhumatoïde en inspectant bien le revêtement cutané ; – de diagnostiquer une varicocèle qui n’est souvent visible qu’en position debout et peut parfois être à l’origine de douleurs scrotales. Il faut également avoir à l’esprit qu’à tout âge un tableau de scrotum aigu peut être révélateur d’une tumeur du testicule, même si ce n’est pas le mode de découverte le plus fréquent. Conclusion Soyons toujours vigilants en présence d’un tableau de bourse aiguë chez un enfant, quel que soit son âge. Les éléments de l’interrogatoire, de l’examen physique restent primordiaux et ne doivent pas s’effacer, comme cela est trop souvent le cas, devant les données de l’imagerie.

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