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Congrès

Publié le 09 fév 2022Lecture 10 min

Échos des Journées francophones de recherche en néonatologie

Mélissa DAVID (Nantes), Mathilde LETOUZEY (Saint-Germain-en-Laye), Gérard LAMBERT (Paris)

Profitant d’une brèche ouverte dans le mur des restrictions sanitaires avant que la cinquième vague ne déferle sur la France, les participants du congrès SFN-JFNR se sont enfin retrouvés en présentiel. Loin de se vouloir exhaustif sur un congrès riche par son contenu, la rédaction de Pédiatrie Pratique a retenu quelques communications au cours de ces journées.

L’enveloppement du nouveau-né à terme D’après la communication de F. Berne-Audeoud Le GREEN (Groupe de REflexion sur l'Environnement du Nouveau-Né) émet chaque année des recommandations issues de recherches systématisées de la littérature et de discussions collégiales pluriprofessionnelles pour améliorer l’environnement du nouveau-né hospitalisé. Ces recommandations sont disponibles sur le site internet de la Société française de néonatologie (https://www.societe-francaise-neonatalogie.com/recommandations). Une de ces recommandations a porté sur les techniques d’enveloppement (swaddling en anglais). L’enveloppement est réalisé avec un linge fin, permettant un certain degré de mouvements. L’enfant est positionné en quadri-flexion, les mains ramenées au visage. Chez le nouveau-né à terme, l’enveloppement est recommandé lors de soins douloureux, mais il ne suffit pas et doit donc être associé à d’autres techniques d’analgésie comme la succion non nutritive ou la succion d’une solution sucrée. Il peut également être proposé lors du bain si l’enfant montre des signes de stress. Chez le bébé de moins de 3 mois, l’enveloppement permet de diminuer la durée des pleurs et une meilleure régulation des états d’éveil. Un enveloppement transitoire pendant l’éveil peut donc être proposé aux enfants de moins de 3 mois présentant des pleurs excessifs. Enfin, pour l’endormissement du bébé, l’enveloppement permet d’augmenter le sommeil, de calmer et de diminuer le nombre d’éveils. Cependant, cette technique augmente le risque de mort inopinée du nourrisson après l’âge de 1 mois. L’enveloppement peut donc être proposé de façon transitoire, uniquement pendant le premier mois de vie, pour favoriser l’endormissement du nouveau-né couché sur le dos, après information des parents sur le risque de mort inopinée. Actualités sur la prise en charge des pathologies en urologie néonatale  D’après la communication de A. Arnaud Le syndrome de la jonction pyélo-urétérale peut être diagnostiqué en anténatal lors des échographies de dépistage ou en postnatal lors d’une pyélonéphrite. Son diagnostic repose sur la mesure du diamètre antéro-postérieur intrasinusal, pathologique si ≥ 6 mm et significatif si > 15 mm. Cette mesure doit être réalisée à J3 de vie, puis à 1 et 3 mois. La résolution spontanée survient dans plus de 80 % des cas. La chirurgie est indiquée si majoration de la dilatation après scintigraphie au MAG3, permettant d’évaluer la fonction rénale. Le reflux vésico-rénal est l’uropathie malformative la plus fréquente et sa prise en charge est très discutée. La très grande majorité des reflux se résolvent spontanément. L’objectif est de prévenir les infections et les cicatrices parenchymateuses, tout en minimisant la morbidité de la prise en charge et des procédures chirurgicales. Le suivi de base repose sur la surveillance échographique. Pour les nouveau-nés asymptomatiques, l’échographie doit être réalisée à J3 de vie, puis à 1 et 3 mois. L’abstention thérapeutique est la base avec une information des parents. L’antibioprophylaxie est indiquée uniquement en cas de dilatation majeure, car elle diminue le risque d’infection urinaire fébrile mais augmente le risque d’antibiorésistance et ne diminue pas les cicatrices rénales. La prise en charge chirurgicale est très discutée car elle est efficace sur l’imagerie mais elle ne diminue pas le risque d’infection urinaire fébrile. La prise en charge des valves de l’urètre postérieur a évolué récemment. En effet, une circoncision est maintenant recommandée chez les garçons en association à la résection des valves car elle a montré son efficacité dans la prévention des infections urinaires fébriles ultérieures. De plus, des études sont actuellement en cours à l’hôpital Necker de Paris pour développer la cystoscopie fœtale, afin d’envisager une résection des valves ayant un retentissement rénal sévère en anténatal. Influence du père sur la programmation fœtale D’après la communication de M.-A. Charles (Inserm, Villejuif) On appelle POHAD, pour Paternel Origins of Pealth and Disease (par allusion au DOHAD, Developemental Origins of Pealth and Disease), l’influence des expositions environnementales paternelles sur le phénotype de la descendance, concept introduit par un épidémiologiste belge en 2018 (Soubry A. Environ Epigenet 2018 ; 4(2) : 1-7) pour souligner l’impact de cas d’exposition sur la voire sur les générations suivantes. Modèles animaux Une première étude avait montré que des rats mâles surnourris en graisses et croisés avec des femelles recevant un régime alimentaire normal donnaient une descendance qui ne présentait pas de différence en termes de poids de naissance et de croissance, mais chez laquelle on constatait, à l’âge de 11 semaines, l’apparition d’une intolérance au glucose en rapport avec une insulinopénie. Une diminution du nombre des cellules bêta dans les ilots de Langerhans était observée, associée à la moindre expression de certains gènes et à des modifications épigénétiques. De nombreuses études ont suivi dans le but d’investiguer les mécanismes sous-jacents à cette influence paternelle. Un travail comparable mené chez la souris a consisté à administrer le même schéma alimentaire chez des mâles, mais ensuite une ICSI (injection intra-cytoplasmique de spermatozoïde) a été pratiquée en injectant la tête du spermatozoïde dans un ovocyte et en comparant la descendance à celle de mâles ayant un régime alimentaire normal. L’apparition d’une résistance à l’insuline a également été mise en évidence, mais cette fois liée plutôt à une insulinorésistance. Forts de cette observation, les auteurs ont réitéré leur protocole mais cette fois en injectant les ARN non codants contenus dans la tête des spermatozoïdes directement dans le zygote. Le même résultat a été obtenu avec cette méthodologie. En reprenant leurs données, ils ont remarqué que certains ARNnc étaient plus abondants dans les gamètes des souris surnourries, des tsRNA. L’injection spécifique de ces tsARN a permis de reproduire leurs observations. Les auteurs ont enfin montré que cette manipulation au stade blastocyte induisait une cascade de modifications dans la synthèse d’ARN non codant, avec pour conséquence une modification de l’expression génique dans de nombreux tissus embryonnaires. Ces expériences ont été reproduites avec d’autres types d’alimentation, des expositions à des toxiques, au stress, mais aussi avec des facteurs environnementaux bénéfiques comme l’activité physique paternelle. On sait que tous ces facteurs sont susceptibles d’entraîner des modifications phénotypiques sur la descendance. Ceux-ci sont le plus souvent induits pas des petits ARN non codants mais d’autres mécanismes épigénétiques ont été rapportés comme des modifications placentaires contrôlées par le génome et l’épigénome paternel. Ainsi, l’obésité chez le rat mâle modifie l’expression de certains de ses gènes paternels et la méthylation globale du placenta. Ces effets peuvent avoir un impact transgénérationnel, c’est-à-dire qu’ils s’expriment sur plusieurs générations. En reprenant le modèle du régime gras, les souriceaux de la première génération vont recevoir un régime normal ou gras et vont être accouplés à des femelles ayant une alimentation normale, puis la même méthodologie est appliquée à la génération F2. On relève que, contrairement aux autres modèles, une petite différence de poids est constatée dans la génération F1. Les souris de la génération F2 ont plus de résistance à la prise de poids malgré un régime surgras, mais elles présentent également une intolérance au glucose traduisant un effet transgénérationnel hérité de l’exposition à un facteur environnemental chez le grand-père. Observations chez l’homme Chez l’homme, il existe de multiples exemples témoignant d’une association entre une exposition environnementale paternelle et le phénotype de sa descendance. Une équipe anglaise a montré que les enfants (garçons ou filles) de pères précocement obèses présentaient une augmentation des enzymes hépatiques à l’âge adulte, alors que le surpoids maternel n’avait pas d’influence sur ce paramètre. Une autre étude a mis en évidence un risque d’asthme augmenté chez les enfants de père fumeurs, en particulier lorsque la consommation avait débuté jeune, avant 15 ans, et même en cas d’arrêt du tabagisme jusqu’à 5 ans avant la conception. Dans ces observations, il n’est pas possible d’éliminer totalement les facteurs génétiques ou les modes de vie familiaux partagés. Pour tenter de le faire, on peut s’intéresser aux caractéristiques à la naissance. C’est notamment ce qui a été fait dans la cohorte nationale ELFE qui suit 12 324 enfants nés en 2011 après 33 SA et recrutés à l’échelle nationale. Sans surprise les enfants, garçons ou filles, ayant une maman de grande corpulence présentent en moyenne un Z-score augmenté à la naissance. En revanche, si on s’intéresse à la corpulence paternelle, les garçons issus de pères maigres ont un Z-score plus faible, alors que pour les filles une association était constatée avec l’obésité paternelle. En caractérisant l’alimentation de 1 000 pères d’enfants inclus dans cette cohorte, plusieurs profils ont été décrits : « énergétique » chez des personnes qui mangent de tout ; « santé » avec un régime riche en fruits et en poissons ; « alcool » ; et un profil « grignotage » avec peu de viandes mais des bonbons, chocolats, chips, etc. La principale association a été mise en évidence avec ce dernier profil, les enfants issus de pères « grignoteurs » ayant un poids de naissance en moyenne supérieur. De nombreuses études ont montré que ces expositions modifient l’épigénome des gamètes. On a également mis en évidence, par prélèvement de sang du cordon, que l’obésité paternelle et maternelle pouvait modifier l’épigénome des nourrissons, ciblant notamment certains gènes impliqués dans la croissance. Pour conclure, Marie-Aline Charles a souligné que les transmissions inter- et transgénérationelles sont bien documentées chez l’animal et que les mécanismes sous-jacents sont de mieux en mieux connus. On note que dans beaucoup de ces modèles, le phénotype varie selon le sexe de la descendance. Chez l’homme, on sait que des modifications épigénétiques des spermatozoïdes sont induites par l’environnement, qu’elles sont réversibles et fonctionnelles. On sait également qu’il existe des associations entre les expositions paternelles et des modifications épigénétiques chez le nouveau-né. Avec un brin de malice, M.-A. Charles a terminé son intervention en remarquant que l’ensemble de ces résultats sont en phase avec l’évolution de la société, qui accorde une place croissante aux pères dans la santé et le développement de leurs enfants. Une corrélation entre le périmètre crânien de naissance et le devenir neurologique des grands prématurés  D’après la communication « Concordance poids et périmètre crânien de naissance chez les grands prématurés et devenir neurologique à 5 ans » de A. Brunet Lors d’un retard de croissance intra-utérin, il existe des mécanismes d’épargne cérébrale par redistribution de la vascularisation fœtale permettant une croissance conservée du périmètre crânien (PC) et c’est lorsque ces capacités d’adaptation sont dépassées qu’il existe une atteinte de celui-ci. L’objectif de cette étude était de déterminer si la concordance des mensurations de naissance chez les prématurés en termes de percentiles de poids et de PC (tableau) était associée au devenir neurologique cognitif et moteur à 5 ans. En comparaison avec le groupe « Eutrophe », la mortalité et la morbidité néonatales étaient significativement augmentées dans le groupe « Hypotrophe » (respectivement OR : 3,1 [2,1-4,5] et OR : 2,2 [1,7-3,0]). À 5 ans, le groupe « Hypotrophe » avait un risque significativement majoré de déficience cognitive modérée à sévère (OR : 2,4 [1,6- 3,5]), de troubles de coordination (OR : 3,4 [2,2-5,3]) et de scolarité (OR : 2,4 [1,6-3,5]). Le groupe « PC conservé » présentait une diminution significative du risque de déficience cognitive légère (OR : 0,7 [0,5-0,9]) tandis que le groupe « PC altéré » avait un risque diminué de déficience cognitive modérée à sévère (OR : 0,5 [0,3-0,9]) mais un risque accru de troubles de la coordination (OR : 1,6 [1,0-2,6]). Il existe une association significative entre la concordance des mensurations de naissance et le devenir néonatal et neurologique à 5 ans du grand prématuré. Les enfants dont le PC et le poids étaient atteints avaient le pronostic le plus sombre, avec une atteinte surtout cognitive. Avoir un PC conservé malgré des difficultés néonatales semblait être associé à un moindre risque cognitif tandis qu’une atteinte isolée du PC était plutôt associée à des troubles de coordination. Il semble donc important de repérer les enfants aux « PC altérés » pour un dépistage précoce des troubles moteurs fins.

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