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Rhumatologie - Os - Orthopédie - Traumatologie

Publié le 04 sep 2006Lecture 9 min

Rhume de hanches : contes et légendes

Ph. Wicart - Hôpital Saint-Vincent-de-Paul, Paris
La synovite aiguë transitoire ou « rhume de hanches » est la cause la plus fréquente des douleurs de hanches de l’enfant. Le véritable problème lié à cette affection est représenté en pratique par ses diagnostics différentiels dont certains nécessitent une prise en charge en urgence.
Le caractère flou des notions étiopathogéniques qui sous-tendent cette affection peuvent justifier les termes de « contes et légendes »… Certains ont évoqué une étiologie bactérienne ou virale(1) d’autres suggèrent le rôle pathogène des protéoglycanes. L’étiologie n’est pas clairement déterminée. Le caractère impalpable — tant dans l’apparition que dans la disparition — du rhume de hanches, ainsi que les variations importantes de ses manifestations peuvent aussi être assimilés aux caractéristiques des contes et légendes.   Quelques chiffres L’âge habituel de survenue du rhume de hanches se situe entre 4 et 10 ans, avec un âge moyen de 6 ans(2,3); dans la tranche d’âge 2-13 ans, sa prévalence est de 3 %(2). Les garçons sont 2 à 3 fois plus affectés que les filles(3). Après un premier épisode, le risque annuel de récidive est de l’ordre de 4 %   Le tableau clinique typique Le clinicien examine un enfant en bon état général, apyrétique, avec une impotence fonctionnelle plus ou moins importante d’une hanche, pouvant aboutir à un refus complet de l’appui à visée antalgique. Il s’agit souvent d’un enfant qui présente un développement assez rapide.   Figure 1. Radiographie de bassin de face : refoulement du liseré graisseux périarticulaire coxo-fémoral gauche, témoin d’un épanchement articulaire. Examen orthopédique La mobilité de la hanche est plus ou moins diminuée, avec parfois une limitation de la flexion, mais il n’existe pas de raideur articulaire comme celle qui peut être notée en cas d’arthrite de hanches. Le reste de l’examen clinique est rigoureusement normal. L’examen clinique doit être complet, en particulier au niveau du rachis, des articulations sacro-iliaques et des membres inférieurs, car des lésions de ces topographies peuvent se manifester par une boiterie, qu’il conviendra alors de ne pas attribuer à une pathologie des hanches. L’existence d’une amyotrophie quadricipitale est plutôt en faveur d’une pathologie chronique.   Arguments radiographiques Il est habituel de réaliser une radiographie du bassin de face et des deux fémurs proximaux de profil. Les clichés peuvent être normaux ou montrer un refoulement caractéristique des liserés graisseux périarticulaires, révélateur de l’épanchement articulaire (figure 1).   Données échographiques L’échographie de la hanche pathologique doit être interprétée avec celle du côté opposé, pour référence. Elle peut permettre : – de quantifier l’épanchement articulaire en mesurant son épaisseur ; – de déceler l’existence d’une éventuelle hyperplasie synoviale ; – de confirmer le caractère homogène et fluide du liquide articulaire (figure 2). La présence d’un épanchement articulaire est en faveur du diagnostic de rhume de hanches.   Figure 2. Échographie : épanchement articulaire de hanche gauche pathologique (à comparer à l’image de la hanche droite qui est normale).   Biologie Le bilan biologique incluant la numération formule sanguine et un bilan inflammatoire (VS, CRP, orosomucoïde) est normal en cas de rhume de hanches. Apport de la scintigraphie Cet examen est indiqué en cas de doute diagnostique. Une légère hyperfixation est en faveur du rhume de hanches. Évolution L’évolution est marquée par une résolution complète et spontanée des manifestations douloureuses et de la boiterie, habituellement en moins d’une semaine et toujours en moins de deux mois(4). La seule séquelle parfois observée est une coxa magna (figure 3), sans conséquence.   Figure 3. Coxa magna un an après une synovite aiguë transitoire gauche. Le diamètre de la hanche gauche est plus grand que celui de la droite de 2,5 mm.   La plupart du temps aucun traitement n’est nécessaire, si ce n’est le repos et un traitement antalgique simple. Parfois, si les phénomènes douloureux sont importants avec impotence fonctionnelle notable, il peut être indiqué de mettre en place une traction en hospitalisation ou à domicile, ce qui permet de faire céder rapidement les phénomènes douloureux et la raideur inhérente. En cas de phénomènes douloureux et de raideur importante ne cédant pas sous traction, il peut alors être indiqué d’effectuer une ponction articulaire sous anesthésie générale (figure 4) (5).   Figure 4. Ponction de hanche gauche par voie obturatrice sous anesthésie générale. Les diagnostics différentiels Les diagnostics différentiels sont essentiellement les infections ostéo-articulaires, dont le traitement est urgent et qui engagent le pronostic fonctionnel, et les tumeurs de l’appareil locomoteur qui peuvent engager le pronostic vital. Mais il peut aussi s’agir d’une arthrite inflammatoire, d’une ostéochondrite primitive de hanches ou d’une épiphysiolyse fémorale supérieure.   L’arthrite septique de hanches C’est le premier diagnostic différentiel à envisager, notamment chez le jeune enfant, d’où l’adage : « Tout rhume de hanches avant l’âge de deux ans est une arthrite septique jusqu’à preuve du contraire ! » Plaident en faveur du diagnostic d’arthrite septique de hanches : une fièvre, une impotence fonctionnelle importante avec une véritable raideur de hanche, un syndrome inflammatoire biologique. Les signes radiologiques de type ostéolyse ou pincement articulaire ne surviennent que tardivement et, alors, le diagnostic ne fait plus de doute. C’est à la phase toute débutante de l’arthrite septique que le diagnostic différentiel est susceptible de se poser avec un rhume de hanches. Dans le doute, une surveillance étroite puis une ponction peuvent amener des éléments en faveur du diagnostic d’arthrite septique. Une ostéomyélite fémorale proximale peut se manifester par les mêmes symptômes, en particulier par des signes articulaires du fait du caractère intra-articulaire de la métaphyse proximale du fémur, entraînant une contamination articulaire septique rapide et fréquente. Le diagnostic et le traitement de l’arthrite de hanches sont urgents en raison de la gravité des séquelles.   « Tout rhume de hanches avant l’âge de 2 ans est une arthrite septique jusqu’à preuve du contraire. »   Autres infections Les autres manifestations infectieuses de proximité peuvent être une ostéomyélite pelvienne, en particulier iliaque, ou une sacro-iléite (figure 5).   Figure 5. Boiterie droite évoluant depuis un mois, révélatrice d’une sacro-iléite droite, bien visible sur la scintigraphie (b) et sur le scanner (c).   La scintigraphie osseuse est une aide précieuse pour l’établissement de tels diagnostics qui sont souvent tardifs.   Pathologies malignes Les autres types de pathologies périarticulaires auxquels il convient de penser malgré leur rareté sont les tumeurs malignes fémorales proximales ou pelviennes. Apparaissent alors des signes radiologiques d’ostéolyse ou d’ostéo-formation souvent visibles au niveau du fémur proximal, mais masqués par l’appareil digestif quand ils siègent sur les os du bassin. Une fois encore, la scintigraphie osseuse en cas de doute est une aide précieuse au diagnostic en cas de topographie pelvienne. La biopsie chirurgicale s’impose en cas de doute. Par ailleurs, une douleur de hanches peut-être une des manifestations d’une hémopathie maligne. Une altération de l’état général, de la fièvre, des anomalies radiologiques, une perturbation de la numération formule sanguine ou, enfin, une hémarthrose lors de la ponction, sont autant d’arguments en faveur du diagnostic d’hémopathie maligne.   L’épiphysiolyse fémorale supérieure Elle survient souvent plus tardivement, après l’âge de 10 ans, chez un enfant au morphotype « adiposo-génital ». L’examen clinique retrouve un défaut de rotation interne. Le diagnostic est radiologique, permettant de noter une bascule postérieure et en varus de l’épiphyse fémorale supérieure sur la métaphyse. Une prise en charge en milieu chirurgical est urgente pour prévenir une augmentation du glissement, qui compromettrait l’avenir à long terme de cette articulation.   L’ostéochondrite primitive de hanches Un diagnostic erroné de rhume de hanches peut être évoqué devant une ostéochondrite primitive ou maladie de Legg-Perthes-Calvé débutante. Cependant, un certain nombre d’éléments initiaux (qui n’ont cependant pas clairement fait leurs preuves) plaident en faveur de cette dernière : – élargissement de l’interligne articulaire avec diminution du volume du noyau épiphysaire fémoral proximal par rapport au côté opposé(1) ; – caractéristiques échographiques du liquide articulaire ; – épaisseur du cartilage de la tête du fémur ; – hypofixation scintigraphique (figure 6).   Figure 6. Boiterie de hanche droite évoluant depuis un mois, révélatrice d’une ostéochondrite primitive de hanche droite. La scintigraphie osseuse montre l’absence de fixation de l’épiphyse fémorale proximale droite alors que celle-ci est normale à gauche. À noter que la radiographie standard peut être considérée comme normale en dehors d’une discrète diminution de la taille du noyau épiphysaire à droite.   Cependant, le diagnostic différentiel initial n’est pas un problème majeur dans l’ostéochondrite primitive puisque cette affection ne justifie pas d’un traitement en urgence ; le diagnostic est souvent porté secondairement devant la persistance des phénomènes douloureux et de la boiterie, justifiant alors des examens complémentaires.   « Le diagnostic d’ostéochondrite primitive de hanches est souvent porté secondairement. »   Les rhumatismes inflammatoires de l’enfant Enfin, une atteinte de la hanche peut être non pas septique, mais la manifestation d’un rhumatisme inflammatoire, dont le diagnostic sera parfois fait secondairement devant l’apparition d’autres signes articulaires ou une évolution plus capricieuse avec allées et venues des phénomènes douloureux (figure 7).   Figure 7. Boiterie de hanche droite évoluant depuis un mois, révélatrice d’un rhumatisme inflammatoire chronique infantile avec une synovite importante bien visible sur l’IRM à droite et prenant le gadolinium de façon intense Les pathologies rachidiennes Une boiterie qualifiée par erreur de rhume de hanches peut être en fait due à une pathologie rachidienne (figure 8), qu’elle soit septique (spondylodiscite), tumorale ou discale (hernie discale). Peuvent orienter vers une telle origine : un refus de se tenir assis comme dans la spondylodiscite lombaire avec une marche en hyperlordose lombaire, une raideur rachidienne parfois associée à une scoliose ou des signes radiculaires comme un signe de Lasègue.   « Le rhume de hanches a bon dos. »   Figure 8. Boiterie évoluant depuis un mois, secondaire à une spondylodiscite L5-S1 diagnostiquée après réalisation d’une scintigraphie. À noter sur la radiographie, la perte de hauteur du disque L5-S1 et la condensation des berges.   Atteintes du genou, de la cheville ou du pied Le membre inférieur du côté de la boiterie doit être examiné dans son intégralité, en particulier par la palpation des segments osseux, à la recherche de douleurs ou d’un épanchement articulaire pouvant témoigner de lésions traumatiques ou infectieuses : ostéomyélite et arthrite du genou, de la cheville ou du pied.   Conclusion La gravité du rhume de hanches ne tient pas à l’affection elle-même, mais à la méconnaissance d’une autre pathologie pouvant nécessiter un traitement rapide, voire urgent, car engageant le pronostic fonctionnel et parfois vital.    

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