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Gynécologie

Publié le 03 mai 2011Lecture 10 min

Pathologies annexielles : y penser à tout âge

S. CAULA-LEGRIEL, C. PIENKOWSKI Unité d’endocrinologie, gynécologie médicale, Toulouse

L’échographie pelvienne est l’examen clé du diagnostic. On évoque un kyste devant une image liquidienne dont la persistance doit faire suspecter un kyste organique, une tumeur organique devant une image hétérogène. En dehors du risque de torsion, la prise en charge doit tenir compte à la fois des impératifs carcinologiques d’une tumeur organique à potentiel malin et de la préservation de la fonction de reproduction. 

 
 
L’ovaire est un organe complexe composé de trois contingents cellulaires qui assurent une double fonction endocrine et exocrine. En dehors des processus infectieux, la pathologie annexielle est représentée par l’ensemble des processus tumoraux secrétant ou non, solides ou kystiques qui se développent aux dépens d’un ou plusieurs contingents de l’ovaire.    Quand penser à une masse ovarienne ? Circonstances diagnostiques • Le maître symptôme est la douleur abdomino-pelvienne dont on note toutes les caractéristiques. On recherche des signes associés digestifs ou urinaires. • Parfois la masse abdominale est palpable. • Certaines tumeurs sécrétantes sont révélées par des signes endocriniens. Quand la tumeur sécrète des oestrogènes, il s’agit d’un tableau bruyant de métrorragies chez la fille prépubère associé à un développement rapide des seins. Chez l’adolescente, les métrorragies s’accompagnent de mastodynie et d’une hyperpigmentation du mamelon. Il peut s’agir d’une sécrétion d’androgènes, responsables d’une virilisation marquée par une acné, un hirsutisme, voire une hypertrophie clitoridienne. • Enfin, il n’est pas rare de découvrir une masse ovarienne de façon fortuite, lors d’une échographie abdominale demandée pour toute autre indication.   Examen clinique Quel que soit le mode de révélation d’une masse ovarienne, l’examen clinique doit être complet. L’interrogatoire insiste sur la chronologie et l’évolution de la puberté, la date des premières et des dernières règles, le déroulement des cycles, l’apparition de leucorrhées, la notion d’activité sexuelle, de contraception et enfin la date du dernier rapport. Chez la petite fille, on recherche une accélération de la vitesse de croissance staturale, un développement des seins (stade de Tanner à préciser), des taches café au lait, des téguments. Dans tous les cas, on recherche également la présence de fièvre, d’une asthénie, d’épisodes douloureux antérieurs ou d’une altération récente de l’état général.   Quels examens complémentaires pratiquer ? ● L’échographie abdominopelvienne par voie abdominale et sus-pubienne couplée au Doppler est l’examen de première intention. Un kyste est défini pour un diamètre de plus de 10 mm pour la fille prépubère (à différencier de simple follicules < 10 mm ) et plus de 30 mm de diamètre pour la fille pubère (le diamètre d’un ovule est de 25 mm). Elle permet : – de visualiser et de décrire la masse (liquide ou solide, homogène ou hétérogène, sa localisation, sa taille, son architecture, sa paroi) ; – de décrire ses rapports aux organes adjacents ; – de caractériser l’utérus et l’ovaire controlatéral. Le Doppler permet l’étude de la vascularisation de la masse. Chez l’adolescente réglée, une masse strictement liquidienne à paroi fine est en faveur d’un kyste fonctionnel. Devant toute masse solide hétérogène, à paroi épaisse, avec des végétations centrotumorales, on évoque une tumeur maligne.   L’IRM abdomino-pelvienne permet de caractériser plus précisément la masse hétérogène et oriente vers le caractère bénin ou malin de celle-ci. Elle permet surtout de réaliser le bilan d’extension.   Le bilan biologique comprend : • un test de grossesse (afin d’éliminer une grossesse extra-utérine) ; • le dosage des marqueurs tumoraux contribuant au diagnostic et permettant le suivi. Ils ont une spécificité cellulaire : – l’alpha foeto-protéine pour les tumeurs germinales et les tératomes ; – les βHCG pour les cellules choriales de choriocarcinome, dysgerminome ; – l’ACE (antigène carcino-embryonnaire) se retrouve pour les tumeurs épithéliales et germinales ; – le CA125 est un marqueur des tissus épithéliaux ovariens, mais peut être augmenté également dans le cadre de pathologies inflammatoires de cancers digestifs ou d’endométriose ; – l’inhibine et l’AMH (hormone antimullérienne) sont des marqueurs des cellules de la granulosa et des tumeurs de Sertoli. On discutera la pertinence : – du bilan infectieux et inflammatoire (pour éliminer une IST ou une autre cause infectieuses locorégionale, selon les signes d’appel) ; – et du bilan hormonal : un taux d’oestrogène ou de testostérone élevé avec des taux bas de gonadotrophines (LH et FSH) oriente vers une tumeur sécrétante des stéroïdes sexuels.   La crainte du chirurgien infantile : la torsion d’annexe sur masse ovarienne La fréquence des tumeurs ovariennes découvertes devant une torsion ovarienne varie de 30 à 84 % des cas (tumeur bénigne ou kyste fonctionnel le plus souvent). Le caractère suraigu et très brutal de la douleur associée d’emblée à des nausées et des vomissements doit faire craindre une torsion d’annexe et réaliser en urgence une échographie Doppler, ainsi que les marqueurs tumoraux et le test de grossesse. La prise en charge est chirurgicale pour une détorsion en urgence, sans retard sous laparotomie ou coelioscopie. La torsion d’annexe sur masse ovarienne est une urgence ! Le pronostic fonctionnel ovarien est en jeu ! Le temps opératoire débute par la détorsion d’annexe, on apprécie ensuite la vitalité de l’ovaire en étant le plus conservateur possible ; l’ovariectomie n’est faite que s’il existe un état de nécrose persistant. S’il existe une masse ovarienne, la tumorectomie peut être effectuée dans le même temps ou secondairement. La réalisation d’une ovariopexie reste un geste difficile et très controversé.   Quelles sont les différentes étiologies ? L’échographie retrouve une masse liquidienne  Kyste fonctionnel Fréquents à l’adolescence, les kystes se développent à partir d’un follicule par défaut de maturation et involuent au cycle suivant. L’échographie note une image uniloculaire, bien délimitée à paroi fine strictement liquidienne. Il faut prévenir la patiente du risque de torsion et réaliser une échographie à la moindre douleur aiguë. L’échographie est contrôlée après les prochaines règles jusqu’à sa disparition. La persistance de l’image kystique au-delà de 3 mois signe l’organicité du kyste. Une exploration (chirurgie exploratrice avec analyse anatomopathologique) est nécessaire. Kyste fonctionnel : il faut prévenir la patiente du risque de torsion et réaliser une échographie à la moindre douleur aiguë.   Kyste sécrétant dans le syndrome de Mac Cune Albright (MCA) Ce syndrome associe chez la petite fille des kystes ovariens sécrétant des oestrogènes et récidivant, responsables d’une puberté précoce périphérique, d’une dysplasie fibreuse osseuse et de taches cutanées café au lait. Chez la très jeune enfant, ces kystes sont parfois isolés sans les autres éléments de la triade.   Figure. Cystadénome séreux chez une jeune fille prépubère. L’examen macroscopique n’a pas permis de retrouver de cortex ovarien sain. Le syndrome de MCA est dû à une mutation somatique activatrice des protéines Gs alpha qui peut être retrouvée dans les tissus atteints comme sur le liquide de ponction ovarien ou dans le sang périphérique.   Kyste organique : les tumeurs épithéliales Les tumeurs épithéliales sont représentées par les cystadénomes séreux (uniloculaire) (figure) ou mucineux (plurilobé à paroi épaisse à contenu mucoïde). Généralement bénin, le diagnostic est difficile à faire : il faut toujours y penser quel que soit l’âge devant tout kyste persistant audelà de 3 mois. Ces kystes ne régressent pas et laminent progressivement tout le tissu ovarien sain environnant. Il y a un risque de bilatéralisation en un ou deux temps, compromettant la fertilité future et un risque de malignité existe (cystadénocarcinome). Kyste organique : il faut toujours y penser, quel que soit l’âge, devant tout kyste persistant au-delà de 3 mois. L’échographie retrouve une masse hémorragique   Kyste du corps jaune Le kyste du corps jaune disparaît spontanément comme le kyste fonctionnel. Il survient volontiers en deuxième partie de cycle chez l’adolescente réglée. Il est parfois difficile de faire la différence à l’échographie entre un kyste du corps jaune hémorragique et une tumeur mucineuse ou séreuse. Ils sont à explorer en cas de persistance ; l’IRM pelvienne peut être une aide au diagnostic.   Endométriome L’endométriome est rare chez l’adolescente ; il s’accompagne de dysménorrhées d’aggravation progressive. Le diagnostic repose sur l’examen clinique (douleur dans la cloison recto-vaginale), l’échographie et l’IRM au moment des règles. Le traitement est hormonal avec un traitement progestatif ou un analogue du LHRH en première intention.   L’échographie retrouve une masse solide ou hétérogène   Tumeurs germinales Elles sont les plus fréquentes des tumeurs ovariennes. • 95 % sont des tératomes matures : les kystes dermoïdes. Ce sont de volumineuses masses hétérogènes, à composants multiples (calcifications). L’IRM visualisant des contingents graisseux est une aide utile au diagnostic. Elle permet l’exploration de l’ovaire controlatéral (10 % de formes bilatérales). Les marqueurs tumoraux font partie du bilan préopératoire. Le traitement est chirurgical pour kystectomie avec préservation du cortex ovarien. Le risque de malignité est corrélé au volume de la tumeur et à l’existence d’autre contingent cellulaire. • 5 % sont des tumeurs malignes : dysgerminomes, le plus souvent sécrétant de l’alphafoetoprotéine et des βHCG. Le traitement est plus complexe, associant chimiothérapie, radiothérapie et chirurgie. Les tumeurs germinales sont les plus fréquentes des tumeurs ovariennes.   Tumeurs des cordons sexuels (tumeurs de la granulosa Leydig-Sertoli et du stroma) Le tableau clinique est représenté par des métrorragies associées à un développement rapide des seins (pseudo-puberté précoce) pour la petite fille. Le diagnostic est fait par l’échographie pelvienne. À l’adolescence, il peut s’agir d’un épisode d’aménorrhée associé à des signes de virilisation (pilosité excessive, raucité de la voie) qui nous orientent vers une tumeur sécrétant des androgènes. Il s’agit généralement de tumeurs bénignes de la granulosa ou des cordons sexuels sécrétant de l’inhibine et de l’AMH.   En pratique, on retiendra  Devant toute douleur abdominale de la petite fille à l’adolescente : pensez à faire une échographie pelvienne.  Toute douleur abdominale aiguë associée à des vomissements doit faire craindre une torsion d’annexe.  L’échographie est l’examen clé pour le diagnostic.  Toute formation liquidienne persistante n’est plus un kyste fonctionnel : c’est un kyste organique, il faut suspecter un cystadénome séreux.  En règle générale, il n’existe pas de kyste fonctionnel chez une enfant prépubère.  Les masses ovariennes solides sont généralement bénignes : tératome mature, mais il peut exister un contingent malin que seule l’analyse anatomo-pathologique peut confirmer.  

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