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Rhumatologie - Os - Orthopédie - Traumatologie

Publié le 05 avr 2009Lecture 8 min

Histiocytose langerhansienne osseuse : manifestations d’une maladie déroutante

C. GAUJOUX-VIALA, Consultation d’histiocytose langerhansienne Service de médecine interne, hôpital Saint-Antoine, Paris

L’histiocytose langerhansienne (HL) est une prolifération de cellules présentant des caractéristiques proches des cellules langerhansiennes (CL), à l’origine de la constitution de granulomes pouvant toucher tous les organes. Elle concerne surtout l’enfant et l’adulte jeune. Le spectre clinique est extrêmement large, allant du granulome éosinophile isolé à des formes multisystémiques menaçant le pronostic vital. La découverte d’une HL nécessite un bilan initial minimal. Le traitement reste controversé. Si les formes localisées ne nécessitent généralement qu’une prise en charge limitée, certaines formes graves impliquent la mise en oeuvre de traitements lourds.

 
Épidémiologie L’HL touche essentiellement l’enfant et l’adulte jeune. La prévalence est estimée à 1/200 000 enfants. La maladie peut néanmoins survenir au troisième et quatrième âge et est alors souvent méconnue. Le sexe ratio est de deux hommes pour une femme. Il y a 40 à 50 nouveaux cas par an.   Physiopathologie Le système des phagocytes mononucléés est constitué de deux types de cellules : les monocytes/ macrophages ayant une activité phagocytaire, et les cellules d’aspect dendritique, dont font partie les CL. Ces dernières captent les antigènes et les présentent ensuite aux lymphocytes T dans les organes lymphatiques régionaux, déclenchant ainsi une réaction immunologique de défense. Ces cellules proviennent en majorité d’une cellule souche hématopoïétique d’origine myéloïde, CD34+. Dans les épithéliums de revêtement, les précurseurs des cellules dendritiques se transforment en CL, sous l’influence du GM-CSF. Les CL expriment le marqueur cellulaire CD1a et la protéine S-100. Son cytoplasme contient les granules de Birbeck caractéristiques, visibles au microscope électronique. Contrairement aux CL, présentes uniquement dans les épithéliums de revêtement, les cellules de l’HL peuvent infiltrer tous les organes. Elles produisent de l’IL-1, du TNFα, du GM-CSF qui contribue à leur auto-entretien « autocrine ». La prolifération histiocytaire est monoclonale dans les formes systémiques, ganglionnaires et osseuses, et globalement polyclonale dans les formes pulmonaires. Ces cellules n’expriment aucun autre caractère de malignité, ce qui pourrait correspondre à l’apparition d’un clone cellulaire non malin au cours d’une hyperplasie réactionnelle des CL. Il existe vraisemblablement une prédisposition génétique avec une concordance plus fréquente chez les jumeaux monozygotes et l’existence de rares formes familiales. En dehors du tabac dans les formes pulmonaires, aucun facteur déclenchant précis des HL ne peut actuellement être retenu.       Figure 1. Atteinte osseuse au niveau du bassin avec images lacunaires à l’emporte-pièce.  Il existe vraisemblablement une prédisposition génétique. Classification Il existe de nombreuses classifications. Celle qui figure dans le tableau est issue des recommandations de l’Histiocyte Society. Les « organes à risque » Tout atteinte du poumon, du foie, de la rate et de la moelle osseuse nécessite une surveillance accrue et souvent le recours à des traitements lourds en cas de dysfonction.   Diagnostic Le diagnostic de l’HL repose sur la recherche d’une preuve histologique, avec immunophénotypage ± examen en microscopie électronique. L’Histiocyte Society propose les critères diagnostiques « gradués » suivants : – diagnostic présumé : aspect évocateur d’une lésion en microscopie optique ; – diagnostic probable : aspect évocateur en microscopie optique, associé à deux ou plus des marqueurs cellulaires suivants : adénosinetriphosphatase (ATPase), protéine S-100, α-D-mannosidase, « peanut lectin » ;  – diagnostic certain : aspect évocateur en microscopie optique, associé à des granules de Birbeck en microscopie électronique et/ou à l’expression du marqueur CD1a.   Critères diagnostiques Le diagnostic est histologique et repose essentiellement sur l’expression du marqueur CD1a ou, plus rarement, sur la mise en évidence des granules de Birbeck en microscopie électronique.   Manifestations cliniques La forme osseuse est la forme unitissulaire la plus fréquente (environ 50 % des localisations chez l’adulte). Les lésions siègent essentiellement aux os suivants : crâne, mandibule, bassin, côtes, clavicule, vertèbres et diaphyses des os longs. Sur le plan clinique, ces lésions peuvent être asymptomatiques ou se traduire par des douleurs localisées parfois accompagnées d’une tuméfaction des parties molles. Figure 2. Atteinte osseuse humérale. Elles peuvent également être révélées lors de complications à type de fractures, de radiculalgies ou très rarement de compression médullaire en cas d’atteinte vertébrale, de déchaussements dentaires lors d’une lésion mandibulaire, d’une atteinte oto-cochléo-vestibulaire en cas d’atteinte temporale ou même d’une exophtalmie en cas d’atteinte orbitaire. Dans une série de la Mayo Clinic de 394 patients d’âge varié, les formes systémiques représentaient 25 % de l’ensemble des cas. La présentation est très variable en fonction des organes atteints. Les formes les plus classiques sont l’atteinte cutanée, particulièrement polymorphe et souvent au premier plan, l’atteinte osseuse faite de lésions multiples, le plus souvent crâniennes, mandibulaires et oto-mastoïdiennes, l’atteinte endocrinienne avec diabète insipide et parfois panhypopituitarisme et l’atteinte pulmonaire. La forme osseuse est la forme unitissulaire la plus fréquente.   Bilan de « débrouillage » d’une histiocytose langerhansienne • Numération formule sanguine, plaquettes • VS • Ionogramme sanguin, créatininémie • Osmolarité sanguine et urinaires (urines du matin) • Bilan hépatique • Radiographie des poumons face profil • Radiographie du squelette et scintigraphie osseuse   Imagerie de l’atteinte osseuse Sur les radiographies, la lésion se présente sous la forme d’une ou plusieurs lacunes osseuses à l’emporte-pièce, le plus souvent sans condensation périphérique. Elles peuvent être de taille variable. Les os les plus touchés sont par ordre de fréquence : le crâne, la mandibule, le bassin (figure 1), les côtes, la clavicule, les vertèbres et les diaphyses des os longs (fémur, humérus et tibia) (figure 2). Une lacune crânienne chez un enfant doit faire discuter en premier lieu une HL. L’atteinte vertébrale prend classiquement l’aspect de vertebra plana mais une atteinte de l’arc postérieur est aussi souvent décrite. Les côtes sont fréquemment touchées avec des lacunes souvent multiples et d’aspect multiloculaire (figure 3). Les lésions peuvent également se présenter avec un aspect de rupture corticale ou une réaction périostée importante posant le problème du diagnostic différentiel avec une ostéomyélite ou une tumeur maligne. La scintigraphie osseuse apporte des renseignements complémentaires. Le scanner et l’imagerie par résonance magnétique ne montrent pas d’aspect spécifique et sont surtout utiles dans le bilan d’extension et des complications. La place de la tomographie par émission de positons est encore à préciser.   Imagerie L’aspect radiologique classique est celui d’une lacune à l’emporte-pièce, de taille variable, sans condensation périphérique siégeant sur la crâne, la mandibule, le bassin, les côtes ou les diaphyses des os longs, mais il peut également mimer une tumeur maligne. Figure 3. Image de nodules multiples et multiloculaires au niveau costal. Évolution et pronostic L’évolution des HL est imprévisible. Le granulome éosinophile de l’enfant est de bon pronostic. Chez l’adulte, on constate une stabilité des lésions osseuses dans environ 50 % des cas et une régression complète, y compris parfois sans traitement, dans 1/4 des cas. Le pronostic des HL systémiques dépend essentiellement de l’étendue des lésions et du dysfonctionnement de certains organes tels que le foie, la rate, le poumon ou le système hématopoïétique. Une rémission apparaît souvent au cours de l’évolution mais des séquelles, fréquemment osseuses, sont présentes dans 10 à 50 % des cas selon les séries, survenant parfois des mois, voire des années après l’atteinte initiale. Les facteurs de mauvais pronostic sont : – diagnostic avant l’âge d’un an ; – atteinte hépatique, pulmonaire, digestive ou de la moelle osseuse ; – dysfonction hépatique, pulmonaire ou de la moelle osseuse ; – > 3 organes atteints ; – mauvaise réponse thérapeutique à 3 mois. Chez l’adulte, on constate une stabilité des lésions osseuses dans environ 50 % des cas et une régression complète, y compris parfois sans traitement, dans 1/4 des cas.   Traitement Le traitement des histiocytoses n’est pas codifié de manière précise et dépend de la forme clinique : HL localisée, multifocale ou diffuse, avec ou sans dysfonction d’organe « à risque ». Les localisations osseuses peuvent être traitées par injection locale de corticoïde dans les formes douloureuses, ou par curetage local avec éventuellement fixation et/ou greffe chirurgicale en cas de lésion potentiellement instable ou de risque fracturaire. La prise d’antiinflammatoire non stéroïdien de type indométacine permet la diminution des douleurs. Quelques observations ont montré l’efficacité du pamidronate dans les formes douloureuses de granulome éosinophile et les HL multisystémiques résistant aux traitements classiques. La radiothérapie ne doit plus être utilisée, sauf cas exceptionnel, en raison du risque cancérigène et de troubles de croissance chez l’enfant. Dans les formes pluritissulaires, on utilise l’association corticoïdes- vinblastine par analogie avec l’attitude thérapeutique préconisée chez l’enfant. La 2-chloro-déoxyadénosine (cladribine) semble donner de bons résultats, mais elle est myélotoxique. La place de la 6-mercaptopurine reste mal définie. Dans la littérature, on trouve une observation d’un enfant de 5 mois ayant une HL multifocale résistant aux chimiothérapies, chez lequel l’étanercept a apporté une amélioration spectaculaire, mais aucun autre cas n’a été rapporté. Dans les formes graves d’HCL résistant aux traitements classiques, une allogreffe de moelle après chimiothérapie à forte dose peut être envisagée mais avec un taux de mortalité d’au moins 20 %. En raison de son association avec l’histiocytose pulmonaire, le tabagisme doit être arrêté.    

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