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ORL et Stomatologie

Publié le 10 mar 2008Lecture 7 min

Épistaxis récidivantes : laisser couler ou cautériser ?

M. FRANÇOIS, Hôpital Robert-Debré, Paris

Plus d’un enfant sur dix a un jour ou l’autre une épistaxis. Ces épistaxis s’arrêtent habituellement toutes seules ou après compression des narines et aucun avis médical n’est requis. Il en est autrement pour les épistaxis récidivantes car elles deviennent socialement gênantes. Les parents demandent s’il n’y a pas moyen d’arrêter ces épisodes de saignement et évoquent en particulier la possibilité d’une cautérisation.

Bien vérifier le diagnostic Avant de proposer une éventuelle cautérisation, le clinicien doit d’abord s’assurer qu’il s’agit bien d’épistaxis essentielles et pas du premier symptôme d’une affection plus préoccupante dont la prise en charge serait tout autre. Deux diagnostics doivent être éliminés : un problème local – et avant tout une tumeur –, et un trouble de l’hémostase.   Le trouble de l’hémostase est probable s’il y a des ecchymoses ou la notion de saignements prolongés lors de la moindre blessure. Mais les épistaxis peuvent être révélatrices d’un trouble constitutionnel ou acquis de l’hémostase et, si l’épistaxis a récidivé plusieurs fois au cours des 15 jours précédents ou si elle a été difficile à juguler, il est opportun de demander un bilan sanguin qui comportera au minimum une numé-ration formule sanguine avec numération plaquettaire, un temps de Quick, un temps de céphaline activée et un temps de saignement (TS). Les épistaxis peuvent être révélatrices d’un trouble constitutionnel ou acquis de l’hémostase. Rappelons que dans la thrombasthénie de Glanzmann (à transmission autosomique récessive) et la maladie de Willebrand (à transmission autosomique dominante), la numération plaquettaire est normale et le TS allongé.    Rechercher une tumeur. Rien qu’en soulevant la pointe du nez, ou avec un otoscope à manche, on peut repérer s’il n’y a pas un corps étranger dans la fosse nasale, ou une tumeur saignante de la cloison. Ces patients seront adressés à l’ORL. Chez le garçon préadolescent, il faut se méfier des épistaxis dès qu’il y a plus de 4-5 ml de perte sanguine car elles peuvent être le signe d’un angio-fibrome nasopharyngien (si l’enfant n’a perdu que quelques gouttes de sang, il est inutile de s’affoler). L’examen ORL prudent au fibroscope retrouvera une masse suspecte dans le cavum. Le diagnostic sera confirmé par  l’examen tomodensitométrique avec injection. Le traitement est chirurgical après embolisation. Chez le garçon préadolescent, il faut se méfier des épistaxis > 4-5 ml, car elles peuvent être le signe d’un angiofibrome nasopharyngien. En fait bien souvent les épistaxis sont isolées, de faible abondance, et l’examen du nez montre une petite croûte au niveau de la tache vasculaire signant l’origine du saignement. Il faut se garder de retirer cette croûte sous peine de récidive immédiate du saignement. Cautérisation : principe et méthodes Principe La cautérisation est la destruction d’un tissu vivant à l’aide d’un caustique ou d’un cautère. La cautérisation permet d’arrêter un saignement actif, mais aussi, dans le cas de la tache vasculaire, de prévenir un saignement ultérieur en générant une fibrose qui va diminuer la fragilité de cette zone. Les épistaxis essentielles de l’enfant proviennent en effet toujours de la tache vasculaire ou zone de Kisselbach, sise au tiers antérieur de la cloison nasale(1). Juste sous la muqueuse se trouvent des anastomoses nombreuses entre des vaisseaux provenant des systèmes carotidiens interne et externe (figure 1), dont les parois sont pauvres en fibres contractiles, d’où une fragilité aux traumatismes (grattage au doigt), à la moindre inflammation (rhinite), au moindre à-coup tensionnel (mouchage, effort, stress, etc.).   Figure 1. Vascularisation de la zone de Kisselbach, siège des épistaxis essentielles de l’enfant.     Les épistaxis essentielles de l’enfant proviennent toujours de la tache vasculaire de Kisselbach, au tiers antérieur de la cloison nasale.     Méthodes   La cautérisation chimique se fait par badigeonnage de la tache vasculaire avec une solution d’acide trichloracétique au tiers, d’acide chromique au tiers, ou bien encore avec une petite boule de nitrate d’argent préparée extemporanément sur un stylet (1-4). L’application étant douloureuse, elle doit être précédée de l’ap- plication de xylocaïne à la naphazoline sur un morceau de coton laissé en place 5 minutes. La xylocaïne insensibilise la muqueuse et la naphazoline entraîne une rétraction de la tête du cornet inférieur, ce qui facilite le geste endonasal ultérieur. Le temps d’application du caustique n’a pas besoin d’être long, quelques secondes suffisent (5). On voit nettement la muqueuse blanchir là où le produit a été appliqué (figure 2). Malgré l’anesthésie locale, le patient ressent souvent des picotements et, pour éviter un éternuement susceptible de déclencher une épistaxis, on lui demande de se pincer le nez pendant 5 minutes.   Figure 2. Blanchiment de la muqueuse après cautérisation chimique.       La cautérisation électrique se fait au bistouri mono- ou bipolaire, sous contrôle de la vue (la tache vasculaire étant tout près de l’orifice narinaire, il n’est pas nécessaire d’utiliser une optique). Ce geste est très douloureux et ne peut se pratiquer que sous anesthésie générale chez l’enfant(3).     La cautérisation électrique nécessite l’anesthésie générale de l’enfant. Cautériser ou pas ? Tout serait simple si la cautérisation était efficace à 100 % ! Malheureusement ce n’est pas le cas. Une cautérisation chimique a peu de chance d’arrêter une épistaxis. La cautérisation électrique est plus efficace, mais qui proposerait une anesthésie générale pour un saignement que l’on peut arrêter beaucoup plus facilement en comprimant les narines ou avec un tamponnement vestibulaire effectué par l’enfant lui-même ou les parents avec du Coalgan® ou du coton hydrophile recouvert de pommade HEC® ? En dehors d’un saignement, la cautérisation chimique a une certaine efficacité pendant quelques semaines ou mois. Son effet peut être conforté par des applications d’une pommade contenant de l’acide tannique (pommade HEC® pour application nasale) (1) : avec un porte-coton, la mère (chez le jeune enfant) ou l’enfant lui-même applique un peu de pommade sur le tiers antérieur de la cloison nasale tous les soirs pendant 15 jours. L’application se fait le soir au coucher, car avec la chaleur du corps la pommade va couler sur la cloison si l’enfant est en décu-bitus, sur la peau du vestibule narinaire (avec un risque de brûlure superficielle) s’il est encore debout. La cautérisation n’est pas toujours efficace et dans certaines séries 5 à 25 % des patients cautérisés ressaignent dans les 2 mois qui suivent (2,3). La cautérisation peut éventuel-lement être répétée quelques mois plus tard. La cautérisation électrique est plus régulièrement efficace, mais nécessite une anesthésie générale. Elle est proposée si l’enfant doit avoir une anesthésie générale pour une autre raison, par exemple une adénoïdectomie, une amygdalectomie… Le risque de perfo-ration de la cloison nasale est important en cas de répétition des cautérisations électriques (4). Or, en cas de perforation de la cloison, les épistaxis sont plus fréquentes et plus difficiles à traiter qu’en cas d’absence de perforation de la cloison. La cautérisation électrique peut être proposée, notamment si l’enfant doit avoir une anesthésie générale pour une autre raison.

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