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Rhumatologie - Os - Orthopédie - Traumatologie

Publié le 12 juin 2008Lecture 9 min

Auto-anticorps en pratique rhumatologique pédiatrique

B. BADER-MEUNIER, Hôpital Necker, Paris
Il existe de très nombreux auto-anticorps susceptibles d’être utiles pour un diagnostic ou un suivi en rhumatologie pédiatrique. Les données cliniques sont essentielles pour poser l’indication de la recherche d’un auto-anticorps et pour interpréter l’examen.
Les facteurs antinucléaires (FAN) Ces facteurs sont dirigés contre des constituants du noyau des cellules et contre des composants intracytoplasmiques d’origine nucléaire. Ils sont recherchés par immunofluorescence indirecte. On distingue plusieurs types de fluorescence : – homogène (correspondant notamment aux anticorps anti DNA natifs), – homogène à renforcement périphérique, moucheté (anticorps anti-antigènes nucléaires solubles), – nucléolaire (anti-PmScl). L’interprétation de la présence de FAN doit tenir compte des signes cliniques associés et du taux d’anticorps. Les FAN sont présents dans de nombreuses situations pathologiques, chez les sujets apparentés de patients ayant une maladie auto-immune, et chez environ 1 % des enfants non malades (tableau). La recherche de FAN est essentiellement indiquée s’il existe des signes cliniques évocateurs de lupus érythémateux disséminé (LED), connectivite mixte ou, plus rarement chez l’enfant, de syndrome de Goujerot Sjögren.   Tableau 1. Principales situations dans lesquelles sont retrouvés des FAN.   Maladies auto-immunes non spécifiques d’organes ; LED, connectivite mixte, syndrome de Goujerot Sjögren, sclérodermie   Maladies auto-immunes  spécifiques d’organes : myopathie  inflammatoire, polyarthrite rhumatoïde, hépatite AI, thyroïdite, myasténie, sclérose en plaques, arthrite juvénile idiopathique…   Infections virales : VIH, hépatite C, Parvovirus B19, EBV  Cancers   Autres maladies : sarcoÏdose, vascularites systémiques, colites inflammatoires, fibrose pulmonaire idiopathique…   Médicaments: minocycline   Sujets sains : 1 % de la population générale   Sujets apparentés à des patients porteurs de maladie auto-immune   Le seuil de positivité permettant d’avoir le meilleur rapport sensibilité/spécificité pour le diagnostic de LED  ou de connectivite mixte est de 1/160, avec une valeur prédictive positive qui n’est que de 40 %. La présence de FAN est également associée à certaines formes d’arthrite juvénile idiopathique (AJI) à début oligoarticulaire ou polyarticulaire ; elle est associée à une fréquente survenue d’uvéite ; la recherche de FAN dans cette situation n’a pas d’intérêt diagnostique propre, mais permet de mieux classer l’AJI, et incite à une surveillance ophtalmologique rapprochée. Nous pensons donc qu’elle est également justifiée dans ce cadre d’oligo- ou de polyarthrite. De nombreuses études pédiatriques concluent que la présence isolée de FAN n’a aucune valeur pour porter un diagnostic de maladie systémique en l’absence d’éléments cliniques évocateurs du diagnostic. À l’inverse, la présence de FAN, totalement  non spécifique, ne doit pas faire éliminer une pathologie maligne. La présence de FAN n’a aucune spécificité ; les FAN doivent donc être recherchés en pratique rhumatologique courante essentiellement s’il existe des signes évocateurs de LED, et d’arthrite juvénile idiopathique à début oligo- ou polyarticulaire. La recherche de FAN est un test de dépistage de faible spécificité, à compléter par des tests plus spécifiques guidés par la clinique et l’aspect de la fluorescence. Les anticorps anti-DNA La recherche d’anticorps anti-DNA ne doit être effectuée que s’il existe des signes évocateurs de LED et des FAN présents. Ce dosage  est la clé du diagnostic. Il existe  trois méthodes, dont les résultats sont parfois discordants :   Le test de Farr détecte des anticorps de haute affinité pour le DNA natif (DNA marqué, immunoprécipitation). Il s’agit d’un test de haute spécificité et de faible sensibilité, méthode de référence pour le diagnostic. Il est bien corrélé à l’activité de la maladie : un doublement du taux d’anticorps en moins de 10 semaines est prédictif d’une poussée. En revanche, une augmentation lente ou un taux élevé stable n’a pas de valeur prédictive.   Le test ELISA est le plus utilisé. Il est  très sensible mais peu spécifique : il s’agit donc d’une bonne méthode de dépistage, mais d’une mauvaise méthode pour apprécier l’évolutivité.   Le test Crithidia luciliae (immunofluorecence) a une bonne spécificité, et peut être corrélé à l’activité de la maladie. Les anticorps anti-antigènes nucléaires solubles (ENA)   Les anticorps anti-Sm : ils sont peu sensibles mais extrêmement spécifiques du LED (présents dans 30% des cas environ).   Les anticorps anti RNP : ils sont utiles pour le diagnostic de syndrome de SHARP, mais n’en sont pas spécifiques (présents dans 30 % des LED).   Les anticorps anti SSa, SSb : ils se rencontrent dans le lupus néonatal, le syndrome de Goujerot Sjögren, le LED.   D’autres auto-anticorps se rencontrent dans des pathologies peu fréquentes en pédiatrie : anticorps anti-Scl70 dans la sclérodermie systémique diffuse, anticorps anti-centromère dans le syndrome CREST (calcifications, syndrome de Raynaud, atteinte œsophagienne, sclérodactylie, télangiectasies), anticorps anti-synthétase (anti-JO1) : dans les polymyosites. Les facteurs rhumatoïdes et anticorps anti-peptides cycliques citrulline   Les facteurs rhumatoïdes sont dirigés contre le fragment Fc des immunoglobulines, G le plus souvent, et détectés par le test au latex (billes de polystyrène recouvertes d’IgG humaines) et la réaction de Waaler-Rose (hémagglutination de globules rouges recouverts d’IgG). Ils sont présents dans 70 % des polyarthrites rhumatoïdes (PR) de l’adulte après un an d’évolution. Ils sont non spécifiques et sont rencontrés dans de nombreuses situations pathologiques et dans la population générale. La PR ne représente que 10 % des formes d’arthrite juvénile idiopathique polyarticulaires de l’enfant. La recherche de facteurs rhumatoïdes est très rarement indiquée chez l’enfant, essentiellement en cas de suspicion de polyarthrite rhumatoïde : polyarthrite symétrique, grosses et petites articulations survenant surtout chez les filles âgées de plus de  8-10 ans Les anticorps anti-peptides cycliques citrulline (CCP) sont positifs essentiellement dans la PR et pourraient avoir un intérêt pour le diagnostic de PR sans facteur rhumatoïde. La PR ne représente que 10 % des formes d’arthrite juvénile idiopathique polyarticulaires de l’enfant. Les anticorps anticytoplasmes du polynucléaire neutrophile (ANCA) Ils sont dirigés contre les enzymes contenus dans les granules azurophiles des polynucléaires neutrophiles : myélopéroxydase et protéinase 3. Il existe deux types d’aspect en immunofluorescence indirecte : – fluorescence cytoplasmique (c-ANCA) correspondant presque toujours à des anticorps anti-PR3, – et fluorescence périnucléaire (p-ANCA), pouvant correspondre à des anticorps anti-MPO, mais aussi à d’autres enzymes. Les ANCA ont une place fondamentale dans le diagnostic des vascularites à ANCA : ils sont présents dans 90 % des cas dans la granulomatose de Wegener généralisée et active (c-ANCA antiPR3) et dans la polyangéite microscopique (anti-PR3 : 20 %, anti-MPO : 50-80 %). En revanche, ils ne sont observés que dans 5 % des cas de périartérite noueuse classique. Les ANCA peuvent être présents dans d’autres pathologies en rhumatologie pédiatrique : maladie de Kawasaki, purpura rhumatoïde notamment. Il faut savoir demander ces examens en urgence, notamment dans la granulomatose de Wegener dans laquelle l’évolution peut être rapidement sévère en l’absence de corticothérapie. Les anticorps antiphospholipides On distingue trois types d’anticorps antiphospholipides (APL) : les anticorps anticardiolipine et les  antib2-glycoprotéine I détectés par une technique Elisa, et les anticoagulants circulants  de type « lupique » dépistés par un allongement du TCA dans la majorité des cas, et confirmés par la mise en évidence de l’inhibiteur in vitro. Ces autoanticorps peuvent être asymptomatiques, découverts fortuitement le plus souvent lors d’un bilan préopératoire 0,7 à 2,4 % de jeunes enfants asymptomatiques ; ils sont alors le plus souvent transitoires et ne prédisposent pas à la survenue ultérieure de thromboses. À l’inverse, ils  peuvent prédisposer à la survenue de thromboses dans d’autres situations. Le syndrome des anticorps antiphospholipides est défini par la présence d’au moins un critère clinique (thrombose veineuse, ou thrombose artérielle ou morbidité gravidique) et d’au moins un critère biologique (anticorps anticardiolipine, anticorps antib2-glycoprotéine I à taux moyen ou élevé, anticoagulant circulant de type lupique confirmé sur deux déterminations séparées d’au moins 6 semaines. Il peut être primaire, ou secondaire à une maladie auto-immune, une infection, une maladie maligne ou une prise médicamenteuse. Il se manifeste par la survenue de thromboses artérielles et surtout veineuses (membres inférieurs, veine cave inférieure, embolie pulmonaire, veine porte, veines sus-hépatiques, veines surrénaliennes), et rarement par un « syndrome catastrophique » ; il est associé à la survenue d’une chorée, d’une thrombopénie auto-immune modérée, et rarement, d’une anémie hémolytique auto-immune. En pédiatrie, les APL doivent donc être recherchés en cas de survenue de thrombose artérielle ou veineuse, de chorée non familiale, de livedo racemosa acquis chez l’adolescent ; ils doivent également être systématiquement recherchés en cas de LED, car la présence d’APL à taux modéré ou élevé incite à une prophylaxie par antiagrégants plaquettaires pour la plupart des équipes.   En pratique on retiendra   Recherche de FAN : en  cas de suspicion de lupus, (connectivite mixte, Goujerot-Sjögren), et dans certaines arthrites juvéniles idiopathiques.   Recherche d’anticorps anti-ADN : si la clinique est compatible avec un LED et en présence de FAN.   Recherche de facteur rhumatoïde  : si la clinique est compatible avec une polyarthrite rhumatoïde (âge > 8-10 ans - polyarthrite symétrique des grosses et petites articulations).   Anticorps antiphospholipide : en cas de thrombose artérielle ou veineuse, d’apparition de livedo racemosa chez un adolescent, de chorée non familiale, de LED.   Il faut savoir demander au biologiste des tests en urgence (ANCA, anti-DNA).   Il faut ignorer les résultats qui ne sont pas confortés par la clinique, et ne pas les répéter en l’absence d’apparition d’anomalie clinique.

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