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Profession, Société

Publié le 18 mar 2014Lecture 5 min

Le piercing, est-ce dangereux ?

C. FOURMAUX-POULAIN, Médecine de l’adolescent, CHI de Créteil
Je voudrais me faire un piercing au nombril et sur le haut de l’oreille, est-ce dangereux ? Cette question, finalement rarement posée par l’adolescent à son médecin (qui constate le ou les piercings lors de l’examen clinique), est l’occasion d’un échange sur les soins et la prévention en général. Le dialogue du médecin avec l’adolescent permet en plus des réponses pratiques sur le sujet, d’analyser ses motivations et de rechercher d’éventuelles prises de risque associées.
Le piercing, longtemps signe d’appartenance à une communauté (hippies, gay, punk…), s’est démarginalisé dans les années 1990 notamment suite à son utilisation sur les podiums des défilés de haute couture (Gauthier, Westwood) et touche un très large public. Sa prévalence varie suivant les pays : il concerne 10 à 51 % des jeunes en fonction des études. Ce sont les filles qui y ont le plus recours (environ 1 garçon pour 3 filles), se faisant piercer le plus souvent le visage et l’abdomen (figure 1). Le piercing a une fonction identitaire. En effet, il est le signe de l’appropriation de son corps par l’adolescent, corps qui n’est plus l’objet de soin des parents, mais un corps décoré, érotisé. Il peut être vu comme une « mise en scène ludique de soi », une « inscription joyeuse dans le monde », pour citer le sociologue David le Breton.   Figure 1. Piercing du nombril non compliqué. Il peut néanmoins être associé à des conduites à risque qu’il faudra rechercher à l’interrogatoire. On y sera d’autant plus attentif si les piercings sont nombreux, effectués dans de mauvaises conditions, voire par l’adolescent lui-même. À noter que les piercings des organes génitaux sont marginaux à cet âge et interrogent quant à la psychopathologie sous-jacente. On sera tenté dans tous ces cas de les assimiler à une attaque du corps et non à un phénomène de mode.   Les complications Elles sont de l’ordre de 10 à 20 % en fonction des études, infectieuses en premier lieu. Complications infectieuses : – bactériennes à streptocoques, staphylocoques (aureus ou epidermidis), pyocyaniques, plus rarement à mycobactéries atypiques, tétanos en l’absence de vaccination ; – virales : hépatites B, C, D, VIH, infections locales à papillomavirus et herpès. Un érythème, une douleur, une augmentation de chaleur locale font craindre l’évolution vers une abcédation. Au niveau des cartilages, une chondrite est particulièrement à craindre du fait de la pauvreté de la vascularisation de ce tissu (figure 2). Figure 2. Piercing du pavillon de l’oreille compliqué d’une chondrite.  L’infection bactérienne peut se généraliser entraînant septicémie, endocardite, choc toxique, infection ostéoarticulaire secondaire à une bactériémie. Complications non infectieuses : – cicatrices hypertrophiques ou chéloïdes ; – hémorragie ; – lésions nerveuses ; – réactions allergiques (surtout avec le nickel) ou inflammatoires chroniques ;  – complications dentaires des piercings intrabuccaux : récessions gingivales, lésions de l’émail. Les recommandations Avant 2008, aucune règle particulière n’encadrait la pratique du tatouage et du piercing, celle-ci étant considérée comme une activité purement artistique. Un guide des bonnes pratiques du piercing a été édité en 2001 suite aux inquiétudes des professionnels et aux études épidémiologiques relatant les complications observées. Un décret paru au Journal officiel début 2008 réglemente la pratique du tatouage, du maquil lage permanent et du perçage corporel : – le professionnel doit déclarer son activité à l’ARS et avoir validé une formation aux conditions d’hygiène et de salubrité par un organisme habilité ; – une salle doit être réservée pour la pratique de ces actes, le circuit des déchets est celui des déchets infectieux ; – le matériel traversant ou en contact avec la peau ou la muqueuse du client doit être à usage unique ou stérilisé avant chaque utilisation (les tiges de perçage doivent être en titane ou en acier chirurgical inoxydable) ; – il est interdit de pratiquer un piercing sur un mineur sans autorisation parentale, un écrit informant des risques doit être remis. À noter que concernant le perçage du pavillon de l’oreille et les ailes du nez, le « pistolet » est toléré, alors que cet outil n’est pas stérilisable, sous couvert de l’utilisation d’un élément jetable stérile entre la peau et le pistolet. Après un piercing, des soins rigoureux doivent être pratiqués : – lavage des mains à l’eau et au savon avant de manipuler le bijou qui doit rester en place ; – rinçage biquotidien avec un antiseptique ; – éviter les baignades tant que la cicatrisation n’est pas terminée ; – consulter devant tout signe évocateur d’une complication infectieuse. Le délais de cicatrisation est variable en fonction du site : 6 à 9 mois pour le nombril, 3 à 9 mois pour le cartilage de l’oreille, 4 à 8 semaines pour le lobe de l’oreille.   En pratique On insistera avec l’adolescent sur l’importance du choix du professionnel, en l’encourageant, par exemple, à visiter les lieux. On recherchera une contre-indication éventuelle : médicamenteuse (prise d’anticoagulants, de corticoïdes, etc.), antécédent de cicatrices chéloïdes. Cette consultation sera l’occasion de mettre à jour les vaccinations pour l’hépatite B et le tétanos, de rappeler l’importance des soins locaux post-piercing. La santé, le bien-être en général, les prises de risque seront aussi abordés lors de la consultation.

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