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Infectiologie

Publié le 25 mar 2024Lecture 5 min

Prévention des infections du nouveau-né et du nourrisson : quelles évolutions ?

Denise CARO, dans le cadre des Rencontres de Pédiatrie Pratique 2024

De tout temps, les maladies infectieuses évoluent mais les bouleversements engendrés par la pandémie de la Covid-19 ont eu des répercussions épidémiologiques exceptionnelles, dont on peut désormais tirer des enseignements(1). La mise à disposition de nouveaux vaccins (ou d’anciens à valence étendue) et de nouvelles formes d’immunisation change la donne. Mise au point sur la prévention des infections chez les nourrissons en 2024.

Selon les données du réseau de surveillance des pédiatres ambulatoires, les bronchiolites à VRS, les grippes, les érythèmes épidémiques à parvovirus B19, les infections à streptocoque A et les pneumopathies, ont tous atteint des pics jamais observés, après la baisse franche due aux mesures barrières liées à l’épidémie de la Covid-19. La consommation d’antibiotiques a subi la même dynamique(2). « Ces enseignements nous incitent à réagir, a noté Robert Cohen. Le calendrier vaccinal a évolué avec des vaccins désormais recommandés chez l’enfant et/ou chez la femme enceinte (coqueluche, méningocoque B, rotavirus, grippe), mais dont la couverture vaccinale reste insuffisante. D’autres améliorations sont attendues, comme un vaccin antigrippal nasal, des vaccins antipneumococciques avec des valences étendues, un vaccin VRS destiné à la femme enceinte pour protéger l’enfant, ou l’administration au nouveau-né d’un anticorps monoclonal capable de prévenir la bronchiolite ».   Pneumocoque et remplacement sérotypique   Le premier vaccin antipneumococcique conjugué (PCV7), destiné à l’enfant (en 2000) a changé l’histoire des infections invasives à pneumocoque (IIP), avec une réduction de 85 % de ces infections aux États-Unis(3), un peu moins en Europe. Au fil du temps, le bénéfice du PCV7 a été amoindri du fait de la responsabilité croissante de sérotypes non vaccinaux (notamment le 19A). Ce remplacement sérotypique a conduit au développement de vaccins à valence élargie – PCV10 et PCV13 – qui ont permis de conserver une bonne efficacité vaccinale. Depuis 2015, on observe à nouveau une remontée des IIP (dans tous les groupes d’âge), essentiellement liée au sérotype 24F non présent dans les vaccins(4). À noter que la portée du vaccin dépasse la prévention des IIP. Le PCV13 a réduit de 41 à 60 % l’incidence des otites moyennes aiguës (OMA) avec un impact également sur les OMA à Hæmophilus(5). La baisse des otites  fébriles s’est accompagnée d’une baisse substantielle du recours aux antibiotiques(6). « Depuis l’introduction des PCV, le fardeau des maladies pneumococciques a chuté. Malgré le remplacement sérotypique, le bénéfice demeure. Toutefois, on doit continuer à s’adapter aux changements épidémiologiques en développant de nouveaux PCVs tenant compte des sérotypes responsables d’IIP et du niveau de virus potentiel de ceux présents dans le portage rhinopharyngé », a conclu Corinne Lévy.   Virus respiratoire et infections à pneumocoque   « Simultanément au développement de vaccins à valence élargie, on peut explorer d’autres voies d’action, a renchéri Naïm Ouldali. Agir sur les virus respiratoires pourrait réduire le risque d’infections à pneumocoque, comme cela a été suggéré par différents auteurs. » Leur hypothèse est que l’altération de la réponse immunitaire au niveau local et les lésions tissulaires rhinopharyngées induites par une infection virale favorisent le passage et la pullulation des bactéries(7,8). En outre, grâce à des modèles d’associations temporelles, on estime que 90 % de la baisse des IIP pendant l’épidémie de Covid serait due à la baisse de la grippe et du VRS (alors que dans le même temps, le portage du pneumocoque n’a pas diminué)(9). Par ailleurs, au Québec, une augmentation des IIP a été observée lors d’une épidémie de VRS sans circulation du virus de la grippe(10). Enfin, le niveau de circulation du VRS est corrélé à l’incidence des IIP(11). « Ces observations sont une incitation supplémentaire à prévenir les infections VRS responsables de bronchiolites chez le nourrisson, véritable enjeu de santé publique », a estimé Vincent Gajdos. En France, 70 % des hospitalisations imputées au VRS surviennent chez les nourrissons de moins de 5 mois(53 % entre 0 et 3 mois). En outre, le VRS circule hors saison épidémique et peut être responsable de bronchiolites à n’importe quel moment de l’année. Enfin, rappelons que le fait d’avoir fait une bronchiolite augmente le risque d’asthme durant l’infection (OR = 3,12) puis ensuite de façon chronique (OR = 2,60)(12,13).   Deux stratégies préventives   Deux stratégies préventives sont possibles : l’immunisation passive du bébé via la vaccination de sa mère au 3e trimestre de grossesse ou l’administration d’une injection d’anticorps monoclonaux spécifiques chez le nouveau-né.Un éventuel vaccin pédiatrique ne semble pas être une solution, dans la mesure où il protégerait trop tardivement l’enfant. C’est la possibilité de stabiliser la protéine F en conformation préfusionnelle à partir de 2013 qui a permis de développer des produits efficaces(14) qu’il s’agisse de l’anticorps monoclonal nirsévimab ou du vaccin VRS-PreF Abrysvo®. Agrée par l’EMA en septembre 2022, le nirsévimab est un anticorps monoclonal IgG1, doté d’une demi-vie de 63 à 73 jours, capable de neutraliser le VRS-A et le VRS-B(15). L’étude Harmonie menée chez 8 000 enfants a montré son efficacité supérieure à 80 % sur les hospitalisations pour bronchiolites à VRS, avec un très bon profil de tolérance(16). Abrysvo® a obtenu une AMM de l’EMA en juillet 2023. Il est en attente d’une recommandation française qui devrait intervenir d’ici quelques mois. Il s’agit d’un vaccin VRS-PreF non adjuvanté contenant deux variants VRS-A et VRS-B de la protéine F en conformation préfusion. La vaccination de la femme enceinte entre la 24e et a 36e semaine d’aménorrhée booste le taux maternel d’anticorps IgG et leur passage transplacentaire dans le sang du fœtus. Ce transfert de la mère au fœtus augmente au fil de la grossesse, si bien qu’à la naissance, le taux d’AC chez l’enfant est 2 fois plus élevé que chez la mère(17,18). L’essai MATISSE de phase 3 a montré une efficacité de 80 % sur la prévention des bronchiolites sévères et de 60 % sur les bronchiolites non sévères chez les nourrissons dès la naissance et jusqu’à l’âge de 6 mois, avec un profil de tolérance très bon chez la mère et chez l’enfant(19). « Une nouvelle histoire du VRS débute, a souligné V. Gajdos. L’effet des deux stratégies préventives ne se résumera pas à la réduction des hospitalisations pour bronchiolites, elles auront sans doute aussi des répercussions sur la fréquence d’autres infections et sur la prescription d’antibiotiques. » D’après le symposium « Les infections du nouveau-né et du nourrisson quelles préventions ? » organisé avec le soutien du laboratoire Pfizer, modéré par Robert Cohen (pédiatre infectiologue, Saint-Maur-des-Fossés) avec la participation de Corinne Lévy (médecin épidémiologiste, Saint-Maur-des-Fossés), Naïm Ouldali (pédiatre, Paris) et Vincent Gajdos (pédiatre, Clamart) dans le cadre des Rencontres de Pédiatrie Pratique 2024

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