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Génétique

Publié le 25 mar 2024Lecture 5 min

Amyotrophie spinale infantile, une urgence diagnostique et thérapeutique

Denise CARO, lors des Rencontres de Pédiatrie Pratique 2024

L’amyotrophie spinale infantile proximale (spinal muscular atrophy, SMA) est une maladie génétique autosomique récessive qui touche un nouveau-né sur 6 000 (soit 120 cas/an en France). C’est la maladie génétique autosomique récessive la plus fréquente après la mucoviscidose. Responsable d’une dégénérescence des motoneurones de la corne antérieure, elle conduit à une faiblesse musculaire progressive et une amyotrophie, toutes deux irréversibles. Seul un traitement peut en freiner l’évolution. D’où la nécessité d’un repérage et d’un adressage en centre spécialisé ultra-précoces.

Le tableau clinique d’une SMA a été décrit pour la première fois en 1980 par Werdnig et le gène SMN1 responsable de la maladie a été découvert en 1995 par le Pr Melki. La délétion homozygote du gène SMN1 est responsable d’une absence totale de production de protéine SMN, indispensable à la survie du motoneurone. Toutefois, il existe un pseudogène SMN2 qui ressemble à SMN1 avec une petite variation transnucléotidique sur l’exon 7, elle-même à l’origine d’un épissage alternatif dans le préARN messager et dans l’ARN messager mature. De ce fait, 90 % de l’ARN messager mature n’aura pas d’exon 7 et donnera lieu à une protéine SMN instable et non fonctionnelle, et dans 10 %, l’ARN messager, l’exon 7 conservé, permettra de produire un peu de protéine SMN fonctionnelle. La gravité du tableau clinique dépend du nombre de copies SMN2 présentes (la majorité des SMA ont une ou deux copies)(1). Or la SMA est désormais accessible à une prise en charge pharmacogénétique, trois traitements ayant une AMM au cours des 6 dernières années(2,3). Tous sont efficaces avant l’apparition des symptômes, d’où le projet de mettre en place un diagnostic néonatal généralisé à l’ensemble du territoire (deux centres, l’un en Nouvelle Aquitaine, l’autre dans le Grand Est, explorent cette possibilité). En attendant la mise en place de ce dépistage, il est impératif de diagnostiquer le plus tôt possible les enfants atteints afin de débuter le traitement avant qu’il ne soit trop tard en termes de pronostic vital ou fonctionnel.   Reconnaître une hypotonie neuromusculaire   La première étape est d’orienter le diagnostic vers une maladie neuromusculaire, afin d’adresser au plus vite le patient à un centre spécialisé. L’hypotonie est un signe clinique aspécifique. Elle peut être d’origine neurologique – centrale ou périphérique – ou extraneurologique (infection, hyperlaxité, etc.). Une hypotonie d’origine neuromusculaire touche l’axe et les membres avec un déficit de la force musculaire. Cette hypotonie contraste avec un éveil parfaitement normal. L’âge de début des symptômes conditionne la gravité de la maladie. La SMA type 1 (maladie de Werdnig-Hoffmann) débute très précocement. L’hypotonie est majeure globale et massive. L’enfant a une hypomobilité paralytique, les racines de ses membres restent collées au lit (attitude en batracien). Il tient mal sa tête et n’acquiert jamais la position assise. Les réflexes ostéotendineux (ROT) sont abolis ; on observe des fasciculations de la langue et des doigts ; le déficit moteur contraste avec un très bon contact et un très bon éveil. Le tableau clinique évolue vers une paralysie des intercostaux (respiration paradoxale) et une déformation thoracique (cri faible et toux inefficace) ; le tronc est effondré avec une scoliose précoce. L’atteinte bulbaire est responsable de troubles de la déglutition. Le décès survient avant l’âge de 2 ans. La SMA type 2 débute entre 6 et 18 mois. Une paralysie flasque essentiellement proximale s’installe insidieusement, avec un défaut d’acquisition : difficulté à s’asseoir ou se lever seul. On observe un effondrement du tronc en cyphose et un faible supporting des membres inférieurs. Comme pour le type 1, l’examen retrouve une abolition des ROT, des fasciculations de la langue et des doigts, et un très bon éveil contrastant avec l’hypotonie. La SMA type 3 (maladie de Wohlfart-Kugelberg-Welander) se révèle soit dès l’acquisition de la marche avec une démarche pseudo-myopathique dandinante, soit un peu après avec l’impossibilité de courir, de monter les escaliers et des chutes fréquentes, soit encore après 3 ans ou même à l’adolescence avec une simple gêne motrice au niveau de la ceinture pelvienne, révélée à l’occasion d’épreuves sportives. L’évolution se fait vers un déficit progressif flasque, proximal. Les ROT peuvent être abolis (mais pas toujours) et on observe une rétraction des achiléens, avec une démarche sur la pointe des pieds, et des chutes fréquentes. Ces formes tardives donnent lieu à une errance diagnostique(4).   Adresser le patient à un centre expert Bien connaître ces différents tableaux cliniques est essentiel, afin de repérer le plus tôt possible les enfants avec une hypotonie neuromusculaire et les adresser à un centre expert pour confirmation (clinique et génétique) du diagnostic de SMA et mise en route d’un traitement approprié. L’avenir fonctionnel et vital de l’enfant est en jeu. « C’est véritablement une urgence diagnostique, a insisté Audrey Bénézit (hôpital Raymond-Poincaré, Garches). Il faut y penser dès qu’il y a abolition des ROT, une atteinte de la ceinture pelvienne qui contrastent avec un bon éveil »(5). Dès qu’une hypotonie neuromusculaire est repérée, on contacte le centre expert le plus proche (coordonnées sur https://www.filnemus.fr/carte-interactive/ou-consulter). Dans les 3 jours qui suivent, l’enfant et sa famille sont vus en consultation et un test génétique est pratiqué confirmant la SMA. En moins d’une semaine, on est en mesure d’annoncer le diagnostic et de discuter en RCP nationale de la stratégie thérapeutique la mieux appropriée. Si bien que l’enfant est traité 2 ou 3 semaines seulement après la suspicion de la maladie. L’objectif du traitement est de permettre à l’organisme de produire à nouveau la protéine SMN et donc de stopper l’évolution de la maladie. Trois traitements sont aujourd’hui disponibles(2,3) : – le nusinersen est un oligonucléotide antisens qui augmente l’expression de la protéine SMN ; il a été approuvé par l’EMA en mai 2017. Le traitement consiste en une injection intrathécale tous les 4 mois(6) ; – le risdiplam (Evrysdi®) modifie l’épissage du pre-mRNA pour générer un mRNA pleine longueur capable de produire la protéine SMN. Il a reçu un avis favorable du CHMP de l’EMA en février 2021. Il est administré per os de façon quotidienne(7) ; – la 3e option propose de remplacer le gène SMN1 par la thérapie génique. L’onasemnogène a obtenu une AMM conditionnelle en mai 2020(8)  Le traitement consiste en une injection IV unique. Sa réalisation relève d’un des 23 centres de référence constitutifs ou des 12 centres de compétence(9). D’après les communications de Marie-Christine Nougues (neuropédiatre, hôpital Trousseau, Paris), Audrey Bénézit (neuropédiatre, hôpital Raymond-Poincaré, Garches) et Isabelle Desguerre (centre de référence neuromusculaire filière Filnemus, hôpital Necker, Paris) au cours d’un symposium organisé par le laboratoire Novartis lors des Rencontres de Pédiatrie Pratique 2024

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