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Douleur

Publié le 19 avr 2022Lecture 16 min

Les douleurs de croissance - Analyse et signification d’un symptôme fréquent

Guy DUTAU, pédiatre, Toulouse

Les enfants se plaignent souvent de douleurs qui touchent surtout les membres, entraînant de fréquents réveils nocturnes, des pleurs et une forte inquiétude des parents. Après un examen clinique normal, les médecins consultés donnent très souvent le même verdict : ce sont des « douleurs de croissance ». Celles-ci peuvent être abordées par une évaluation de la façon dont les parents vivent ce symptôme, par un examen clinique soigneux et par des revues systématiques ou métaanalyses qui aident à mieux connaître ce curieux symptôme.

Vignette clinique - Romain, âgé de 5 ans, n’a pas d’antécédents pathologiques. Depuis près de deux ans il présente des douleurs nocturnes au niveau des membres inférieurs, uni-ou bilatérales. Sa mère décrit bien ces épisodes : « Il se réveille en hurlant de douleur et ces douleurs durent 10 à 15 minutes en moyenne. Elles s’estompent puis disparaissent le plus souvent après la prise d’une dose de paracétamol ». La maman a l’impression qu’il s’agit de « crampes au niveau des cuisses et/ou des mollets [...] Ces épisodes douloureux surviennent à peu près une fois par mois, le plus souvent plusieurs jours de suite ». Pour les parents, il ne semble pas y avoir de relation avec l’activité physique de l’enfant au cours de la journée. À l’annonce du diagnostic de douleurs de croissance aux parents, les médecins ajoutent souvent : « Ce n’est pas étonnant, Romain — c’est le prénom de l’enfant qui fait l’objet de la vignette clinique ci-dessus — vient de faire une forte poussée de croissance ». Historique et essais nosologiques Les pédiatres connaissent depuis longtemps les « douleurs de croissance » puisque, à notre connaissance, la première description est attribuée à Duchamp en 1823(1). Dans leur ensemble, les pédiatres désignent sous ce terme un syndrome douloureux commun, bénin et récidivant, dont le pic d’incidence ne correspond pas forcément à la période où la vélocité de croissance est maximale(2,3).Ces douleurs qui affectent principalement les membres inférieurs sont bilatérales et extra-articulaires, durent de quelques minutes à quelques heures, et surviennent par cycles(4). Parmi d’autres auteurs, Lehman et Carl(2) ont précisé les caractéristiques des douleurs de croissance en analysant les articles publiés sur PubMed entre 1900 et 2016, et en utilisant plusieurs types de requêtes comme douleurs de croissance (growing pains), douleurs bénignes des membres (limb pains), douleurs récidivantes des membres (recurrent limb pains), douleurs nocturnes et bénignes des membres (benign nocturnal limb pain). En pratique, la majorité des enfants qui en sont atteints se plaignent de douleurs surtout nocturnes ou survenant en début de soirée, principalement localisées aux membres inférieurs et supérieurs(2). La majorité d’entre elles sont traitées par des analgésiques en vente libre, associés à des messages et des paroles maternelles de réconfort, au moins aussi importantes(2). Lorsque ces enfants n’ont aucun antécédent pathologique et que leur examen clinique est strictement normal, les examens biologiques et radiologiques sont normaux(2). Enfin, ces douleurs n’entraînent pas de boiterie(2). Parmi 532 enfants d’origine méditerranéenne, Kaspiris et Zafiropoulou(3) ont étudié 130 d'entre eux âgés de 4 à 12 ans qui, au cours de l’année écoulée, avaient eu des symptômes compatibles avec des « douleurs de croissance ». Leur âge moyen au moment des symptômes était de 8,6 ± 2,5 ans et ces douleurs survenaient entre 3 et 6 ans. Par la suite, leur intensité et leur fréquence semblaient diminuer. Globalement, ces auteurs estiment qu’un tiers des enfants âgés de 3 à 12 ans ont des « douleurs de croissance » à un moment donné de leur existence, apparaissant en fin de journée ou dans la nuit. Celles-ci « (...) surviennent aussi bien chez les garçons que chez les filles, même si certains auteurs avaient pensé qu’elles étaient plus fréquentes chez ces dernières » Sémiologie des douleurs de croissance Rapportées par les enfants et interprétées par les parents, les douleurs dites de croissance surviennent le plus souvent le soir ou la nuit(2,5,6). Principales caractéristiques Les douleurs se situent surtout au niveau des membres inférieurs, intéressant les cuisses et les jambes, très souvent les genoux, mais de façon non articulaire(2,5,6). Les bras et les avant-bras peuvent être touchés ; le massif facial et les mâchoires sont rarement atteints. Elles débutent en fin d’après-midi ou, beaucoup plus souvent pendant la nuit, entraînant un réveil, des cris, des pleurs et une insomnie rarement préjudiciable aux activités du reste de la journée, même si elles disparaissent le matin. Si, classiquement, elles ne sont pas en rapport avec l’activité physique, il est souvent difficile d’affirmer cette absence de lien. Elles peuvent cesser pendant plusieurs jours ou même plusieurs semaines, puis récidiver. Leur intensité n’augmente pas avec le temps(2). Les douleurs peuvent être ressenties comme très violentes chez les petits enfants, sourdes et térébrantes chez les plus grands. Parfois, elles sont beaucoup moins importantes à type de picotements ou de fourmillements. Leur durée est variable, de quelques minutes à quelques heures1.2. Si elles peuvent cesser spontanément, elles sont souvent calmées par des antalgiques en vente libre comme le paracétamol, et par des massages prodigués par les parents. Parmi 30 cas réunis de façon prospective par Pavone et coll.(4) entre janvier 2006 et décembre 2007, chez 18 garçons et 12 filles, âgés de 3 à 14 ans, les douleurs apparaissaient pendant la nuit (43,3 %) ou l’après-midi (56,7 %). Les deux membres inférieurs étaient touchés dans 80 % des cas, entraînant un réveil (40 %) ou des cris de douleur (37 %). Leur fréquence était variable : quotidienne (5 %), une fois par semaine (45 %), mensuelle (35 %), tous les 3 mois (15 %). Dans cette série, il est important d’observer que ces douleurs étaient le plus souvent calmées par les massages (95 % des cas), alors que seuls 5 % des enfants avaient besoin d’analgésiques3. Il existait des antécédents familiaux de « douleurs de croissance » dans 1 cas sur 5. Fait important, tous les examens de laboratoire qui ont été effectués, en particulier le bilan phosphocalcique, la numération formule sanguine (NFS) et la vitesse de sédimentation globulaire (VS), étaient normaux(6). Une étude contrôlée de Asadi-Pooya et Bordbar(7) menée pendant 2 ans a abouti aux mêmes conclusions sur un plus grand nombre de cas (100 patients et 150 témoins) et davantage d’examens (NFS, VS, calcémie, phosphorémie, phosphatases alcalines, facteur rhumatoïde). Les critères d’exclusion étaient des symptômes et signes systémiques, des symptômes localisés, une atteinte articulaire, une limitation de l’activité : aucune différence n’a été constatée entre les deux groupes. Pour ces auteurs, les douleurs de croissance constituent un diagnostic clinique : aucun examen de laboratoire n’est nécessaire, ce qui confirme l’opinion générale de l’inutilité des examens biologiques au décours de ces douleurs4(7). 1-  https://sante.lefigaro.fr/article/douleurs-de-croissance-chez-l-enfant-faut-il-s-inquieter/ (consulté le 10 novembre 2021). 2- Ce type de symptômes peut prêter à confusion avec le « syndrome des jambes sans repos ». https://sante.lefigaro.fr/article/insomnies-reveils-en-pleine-nuit-et-si-c-etait-le- syndrome-des-jambes-sans-repos/ (consulté le 10 novembre 2021). 3- L’effet apaisant des massages, en particulier maternels, est souvent signalé dans la littérature, ce qui peut être un argument indirect en faveur du rôle du stress. 4- Nous n’avons pas trouvé d’étude comparative de ce type permettant d’apprécier, dans le cadre strictement limité, la pertinence d’examens tels que les dosages sériques du fer, du zinc, de la vitamine D (25OHD3) ou d’autres vitamines, ou de l’ionogramme sanguin souvent évoqués dans certains forums. Examen clinique L’examen clinique est capital car il permet d’éliminer un grand nombre de diagnostics différentiels. L’examen physique est normal, en particulier celui des membres(2) et des articulations est indolore .Une douleur à la palpation des articulations devrait éveiller l’attention de l’examinateur et faire rechercher d’autres causes, en particulier un traumatisme, une maladie inflammatoire ou une épiphysite de croissance. À cet égard, il est important de noter que, dans ce syndrome, il n’existe pas de symptômes inflammatoires ni de déformations osseuses, ce qui justifie la dénomination utilisée par Lowe et Hashkes : « douleurs de croissance : un syndrome douloureux non inflammatoire du jeune enfant »(5). L’inspection peut montrer, surtout si l'enfant est turbulent, des égratignures, des écorchures, voire des ecchymoses que l’interrogatoire peut facilement relier aux jeux ou à une activité physique et sportive au cours des jours précédents. En cas d’ecchymoses non traumatiques, une NFS est habituellement demandée. Diagnostic Diagnostic positif La définition des « douleurs de croissance » comporte tous les éléments nécessaires à leur diagnostic : « syndrome douloureux commun, bénin et récurrent, dont le pic d’incidence se situe entre 3 et 6-12 ans, ne correspondant pas à la période où la vélocité de croissance est maximale, associé à un examen clinique normal ». Ce diagnostic impose un interrogatoire et surtout un examen clinique soigneux pour éliminer de nombreux diagnostics différentiels (tableau). L’examen de l’état des diverses articulations et de leur mobilité est essentiel, ainsi que celle des diverses épiphyses. Constat important, les auteurs de la littérature soulignent que le diagnostic est uniquement clinique et qu’aucun examen biologique n’est nécessaire(4-6). L'étude iranienne cas-témoins de Adsadi-Pooyac et Bordbar(7) a comparé pendant 2 ans 100 patients atteints de douleurs de croissance récidivantes durant depuis plus de 3 mois et 150 témoins. Les critères d’exclusion des patients étaient des symptômes et signes systémiques, des symptômes localisés, une atteinte articulaire, une limitation de l’activité. Les examens effectués étaient les suivants : NFS, vitesse de sédimentation globulaire, calcémie, phosphorémie, phospatases alcalines, facteur rhumatoïde : aucune différence n’a été constatée dans les deux groupes confirmant l’opinion générale de l’inutilité des examens biologiques au cours des « douleurs de croissance »4(7). En 2005, Friedland et coll.(8) ont proposé de réaliser des échographies afin de rechercher une diminution de la vitesse de conduction osseuse, faisant l’hypothèse que les douleurs de croissance pourraient être associées à une « hyper-utilisation locale de certains segments du squelette ». Ils ont trouvé une diminution significative de la vitesse du son osseux au niveau de la partie moyenne du tibia et du radius, en regard des zones douloureuses, chez 39 enfants atteints de douleurs de croissance comparés à des témoins : le Z-score était très significativement diminué au niveau du tibia aussi bien chez les garçons (p = 0,0001) que chez les filles (p < 0,0001), et au niveau du radius, seulement chez les filles (p = 0,006)(8). Dans cette étude, il n’existait pas de relation avec d’autres facteurs cliniques et démographiques, l’ethnie et l’index de masse corporelle(8). À notre connaissance, il n’existe pas d’autre étude portant sur cet éventuel marqueur. 4- Nous n’avons pas trouvé d’étude comparative de ce type permettant d’apprécier, dans le cadre strictement limité, la pertinence d’examens tels que les dosages sériques du fer, du zinc, de la vitamine D (25OHD3) ou d’autres vitamines, ou de l’ionogramme sanguin souvent évoqués dans certains forums. Diagnostics différentiels Le diagnostic de « douleur de croissance » étant pour beaucoup d’auteurs un « diagnostic d’élimination »(8-10), de très nombreuses affections, inflammatoires, infectieuses, vasculaires, hématologiques, traumatiques, structurelles, métaboliques et autres doivent être soigneusement éliminées. Elles sont représentées sur le tableau. En pratique, il est important de distinguer d’une part, les « douleurs de croissance » stricto sensu et, d’autre part, les symptômes voisins au cours de certaines affections qui peuvent en imposer pour des « douleurs de croissance », avoir des caractéristiques semblables, ou même s’y associer ou leur succéder. Dans un article intitulé « Les douleurs de croissance chez l’enfant existent-elles ? », Horlé et Wood(11) précisent que « leur approche diagnostique et thérapeutique a changé et que surtout « des diagnostics comme la fibromyalgie5, le syndrome des jambes sans repos6 ou diverses pathologies musculaires » doivent être prises en compte et recherchées. Toutefois, l’analyse de la littérature suggère que ces affections sont plutôt des diagnostics différentiels que des endotypes du syndrome de « douleurs de croissance ». Les « épiphysites de croissance »7 ou « ostéochondrites de croissances » sont des maladies des extrémités osseuses, touchant l’enfant et l’adolescent, localisée sur le noyau de l’épiphyse de certains os(12). Elles sont expliquées par le surmenage des zones articulaires pendant la croissance, souvent associées à la pratique intensive de certains sports. Ces affections ne devraient pas être classées stricto sensu parmi les« douleurs de croissance » dont elles constituent à notre avis un diagnostic différentiel. Elles se manifestent par des douleurs persistantes qui peuvent aboutir à la nécrose du noyau épiphysaire, à l’origine possible de séquelles et de déformations de la région atteinte(12). Toutefois, pour certains auteurs, la distinction n’est pas toujours facile entre les ostéochondroses ou ostéodystrophies de croissance et les « douleurs de croissance ». Dans une revue de Gicquel(13) concernant ces affections au niveau du pied ou de la cheville, l’auteur précise : « Les termes ostéochondrose ou ostéodystrophie de croissance désignent un groupe de pathologies touchant les zones de croissance et dont l’expression peut varier en fonction de la localisation et du type de sollicitation (compression ou traction). L’augmentation des sollicitations mécaniques, le plus souvent sportives pendant la croissance, notamment sa phase d’accélération pubertaire, joue un rôle majeur. S’y ajoutent d’autres facteurs, génétiques, hormonaux ou nutritionnels (déficit en vitamine D) »(13). En pratique, même si leur diagnostic relève de l’interrogatoire et de l’examen clinique, les douleurs de croissance peuvent être un diagnostic de facilité, tant les diagnostics différentiels sont nombreux, ce qui justifie de souligner qu’elles constituent un diagnostic d’exclusion(9,10). 5- Également appelée « fibrosite » ou « syndrome polyalgique idiopathique diffus », la fibromyalgie est une affection chronique mal reconnue, de traitement difficile qui associe pendant des années une fatigue inexpliquée et des troubles du sommeil. Bien que décrite presque exclusivement chez les adultes, elle pourrait exister chez l’enfant. C’est un diagnostic d’élimination. https://public.larhumatologie.fr/grandes-maladies/fibromyalgie (consulté le 11 novembre 2021). 6- La maladie (ou syndrome) des jambes sans repos ou maladie de Willis-Ekbom ou paresthésies agitantes nocturnes des membres inférieurs) se traduit par une envie irrésistible de bouger les jambes et s’accompagne surtout d’un inconfort. Elle est rarement associée à des douleurs vives comme celles des « douleurs de croissance ». Les symptômes sont sur-tout présents le soir et la nuit. Ce trouble sensitivo-moteur est de nature génétique. En population générale, il est plus fréquent chez les adultes (circa 8,5 %) que chez les enfants de 12 à 12 ans (2 à 4 %). https://www.france-ekbom.fr/syndrome/enfant.php (consulté le 11 novembre 2021). Entre 1947 et 2021, nous avons trouvé plus de 5 000 résultats sur PubMed, les publications s’étant multipliées depuis 2000, alors qu’auparavant cette affection était confidentielle (consulté le 11 novembre 2021). 7- Selon les localisations, on décrit les maladies de : Scheuermann (atteinte des plateaux vertébraux), d’Osgood-Schlater (tubérosité tibiale antérieure), Sever (calcanéum), Legg-Calvé-Perthes (hanche), Haas (tête de l’humérus). Le symptôme commun est la douleur ; les autres symptômes varient selon la localisation (boiterie, blocage articulaire). Le soulagement et le repos de l’articulation sont les deux principes du traitement. En cas de fragments osseux libres, leur fixation ou leur ablation est nécessaire. Mécanismes et physiopathologie Dans la mesure où il n’existe pas d’examen radiologique ou biologique permettant d’étayer le diagnostic, et en l’absence d’anomalie spécifique en particulier radio-visible, les pédiatres ont surtout évoqué des causes mécaniques ou biologiques, même si, pour ces dernières, la littérature indique qu'aucun examen biologique n'est utile ou pertinent(5,7). Des hypothèses mécaniques sont le plus souvent invoquées pour expliquer ces douleurs. Une « théorie mécaniste » voudrait que l’os se « détende » à la suite des « compressions » accumulées pendant la journée par l’activité de l’enfant, les jeux, les courses et les sauts. Toujours dans ce cadre « mécaniste », on pense souvent que les os grandiraient plus vite que les muscles et les tendons, ce qui expliquerait des contraintes entre l’os et les insertions tendineuses, d’autant plus que ces douleurs sont associées, chez certains enfants, à une hyperactivité physique pendant la journée. Toutefois, l’étude de Pavone et coll.(6) ne relevait aucun profil de ce type et, à notre connaissance, aucune démonstration de ce mécanisme n’a été apportée jusqu’à présent. L’opinion des parents est facilement accessible sur internet car une requête avec l’item « douleurs de croissance » fait apparaître un très grand nombre de résultats. Un enfant sur 5 aurait des « douleurs de croissance » à un ou plusieurs moments de sa vie, les âges les plus concernés étant de 3 à 5 ans. Les causes évoquées sont nombreuses : la vitesse de croissance osseuse est plus importante pour les os que pour les muscles et les tendons ; la fatigue musculaire pendant la journée est souvent en cause, ainsi que l’exercice physique et les jeux auxquels sont souvent associés des traumatismes qui peuvent être oubliés mais, dans ce cas, s’agit-il véritablement de douleurs de croissance ? La mobilité articulaire excessive de certains enfants peut être invoquée sans qu’il s‘agisse d’une hyperlaxité articulaire pathologique. En fait, à notre connaissance, aucun de ces mécanismes n’est scientifiquement étayé par des preuves ! Il est donc préférable de se référer à des arguments solides, et les seuls que nous avons trouvés proviennent de la récente métaanalyse de Pavone et coll.(14). Les auteurs ont inclu dans leur revue systématique 32 articles, quel que soit leur niveau d’évidence, comportant des résultats précliniques ou cliniques, et mentionnant les causes de ces douleurs de croissance. Les éléments furent traités par deux auteurs indépendants, selon les méthodes classiques des métaanalyses. Les causes possibles suggérées par cette métaanalyse sont les suivantes(14) : - susceptibilité génétique. L’importante fréquence avec laquelle des antécédents familiaux de douleurs de croissance sont rapportés suggère une susceptibilité génétique, qu’accrédite les études sur les jumeaux monozygotes . Une autre étude montre que le risque d’avoir des douleurs de croissance était plus élevé en cas d’antécédents familiaux de ce type de douleurs(15). Dans cette étude, d’autres facteurs associés étaient l’obésité et une hyperactivité de l'enfant(15) ; - anomalies psychologiques. Les enfants atteints de douleurs de croissances ont davantage d’anomalies psychologiques (irritabilité, nervosité, peur de l’obscurité, tics, énurésie nocturne). Ils ont aussi un seuil de douleur plus bas que la moyenne. Ils sont également plus souvent hyperactifs, anxieux et agressifs. Ces caractéristiques sont associées à des troubles psychologiques intrafamiliaux, en particulier une instabilité émotionnelle de la mère(16) ; - comorbidités. De nombreuses études ont tenté, en vain, de trouver des anomalies biologiques spécifiques et/ou des liens avec certaines affections comportementales déjà évoquées ; - mélatonine. Les niveaux de mélatonine seraient impliqués(17). Le réveil dû à la douleur qui incite les parents à allumer la lumière de la chambre pour voir pourquoi l’enfant se plaint constituerait un geste capable de diminuer la douleur en agissant sur les niveaux de mélatonine. Laisser une lumière légèrement allumée est souvent associé à un bien-être et au retour au calme de l’enfant. Un pas est franchi sur le net où l’utilisation de mélatonine est préconisée pour traiter les diverses expressions des troubles du sommeil, en particulier le syndrome des jambes sans repos. Il convient de suivre à cet égard les recommandations restrictives de l’Anses (Agence nationale de sécurite sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail)8 ; - électrolytes, magnésium et métaux. Si Lech et coll.(18,19) ont signalé des troubles électrolytiques, toutefois la grande étude cas-témoins de Asadi-Pooya et Bordbar(7) ne permet pas de soutenir cette hypothèse. Lech a également observé des variations de la teneur des cheveux en plomb, cuivre, zinc et magnésium chez 153 enfants (1-15 ans) et jeunes personnes (16-18 ans) atteints de diverses affections (hyperexcitabilité, convulsions, troubles de la conscience, ainsi que des douleurs ostéo-musculaires d’origine inconnue – douleurs de croissance) mais ces pathologies sont disparates, sans lien probant avec les douleurs de croissance ; - syndrome des jambes sans repos. Plusieurs auteurs observent des similarités entre le syndrome des jambes sans repos et les« douleurs de croissance » et leur(in 11) association a été observée . En l’état actuel de nos connaissances, il est cependant trop tôt pour avancer que ce sont deux endotypes d’un syndrome plus large, mais la discussion est ouverte, etc. Toutefois, certains enfants primitivement atteints de douleurs de croissance ont secondairement développé un syndrome des jambes sans repos(20) ; - facteurs prédictifs. Une étude de Walters et coll.(21) a mis en évidence quelques facteurs pouvant prédire des douleurs de croissance : augmentation de la mobilité articulaire et de la force des muscles de flexion dorsale de la cheville, augmentation du poids corporel, hypovitaminose D. À notre connaissance, ces résultats n’ont pas encore été validés par d’autres auteurs, même si l’hypovitaminose D est un candidat potentiel. 8- https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT2016SA0209.pdf (consulté le 11 novembre 2021). Traitement Les principaux éléments du traitement sont les massages apaisants et, s’ils ne sont pas suffisants, la prise d’un antalgique, le plus prescrit étant le paracétamol. Le maintien d’un éclairage discret est très souvent bénéfique. En cas de troubles psychologiques familiaux, l’intervention d’un psychologue peut être nécessaire. Conclusion Alors que les douleurs de croissance sont connues depuis plus de 200 ans, cette revue confirme que leur diagnostic ne peut être effectué que par un interrogatoire et un examen clinique soigneux, permettant d’éliminer un grand nombre d’affections génératrices de douleurs récidivantes des membres. Toutefois, il faut toujours garder à l’esprit que ce type de douleur est un diagnostic d’élimination, sachant que plusieurs auteurs émettent des doutes sur la réalité de cette « entité »(22). Devant un symptôme connu depuis plus de deux siècles, affectant un très grand nombre d’enfants et posant des questions de médecine de premier recours, il est étonnant qu’une grande étude prospective n’ait pas été encore entreprise, car elle serait d’une grande utilité.

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