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Infectiologie

Publié le 13 avr 2010Lecture 8 min

Les suppurations péripharyngées de l’enfant : quand y penser ?

S. AYARI-KHALFALLAH, C. FUCHSMANN, P. FROEHLICH, Hôpital Femme–mère–enfant, Lyon

Les suppurations péripharyngées de l’enfant sont des patho-logies rares dont le diagnostic n’est pas toujours facile. Néanmoins, il faut savoir les reconnaître pour éviter des complications pouvant être dramatiques. Une imagerie du pharynx doit être réalisée au moindre doute pour conforter le diagnostic. Leur prise en charge est médico-chirurgicale.

 
Diagnostic positif Le tableau clinique associe habituellement un syndrome infectieux fébrile et des signes d’appel pharyngés à type d’odynophagie, et parfois une hypersiallorhée. Les parents rapportent souvent une douleur à la mobilisation cervicale, voire la présence d’un torticolis qui, associé à la fièvre, est très évocateur du diagnostic. Figure 1. Coupe axiale schématique de l’oropharynx et des espaces péripharyngés.  L’examen de l’oropharynx peut être pauvre, contrastant avec l’importance des symptômes (gorge rouge sans plus), faisant ainsi penser à une suppuration plus profonde. Ailleurs, il peut retrouver des éléments faisant suspecter le diagnostic : un bombement d’une paroi pharyngée postérieure ou latérale, ou des anomalies unilatérales de la loge amygdalienne. La palpation cervicale peut retrouver des adénopathies cervicales réactionnelles. Dans ces cas, l’examen clinique doit être complété par un bilan biologique inflammatoire et par une tomodensitométrie (TDM) cervicale et pharyngée avec injection de produit de contraste, qui reste l’examen de référence. La TDM cervicale et pharyngée avec injection de produit de contraste reste l’examen de référence.  Examens complémentaires • La TDM sera réalisée sous simple sédation. Elle permet de confirmer le diagnostic, de préciser l’existence ou non d’une collection, sa localisation et son extension. • L’échographie cervicale est intéressante si l’on suspecte une abcèdation des ganglions cervicaux, mais n’est pas performante pour visualiser la collection péripharyngée. • L’IRM cervicale et pharyngée est un examen sensible pour l’étude des parties molles. La prise de contraste autour de la collection, après injection de gadolinium, est équivalente à celle retrouvée sur le scanner. Par rapport au scanner, il a l’avantage de ne pas irradier l’enfant, mais l’accès à cet examen est plus difficile et il nécessite chez le jeune enfant une immobilisation prolongée sous anesthésie générale.  Figure 2. Phlegmon périamygdalien droit (bombement du voile et luette refoulée à gauche). • Sur le plan bactériologique, les germes les plus fréquemment rencontrés sont des associations aérobies-anérobies. Plus des deux tiers sont sécréteurs de bêtalactamases. Plus des deux tiers des germes rencontrés sont sécréteurs de bêtalactamases. Formes cliniques Il existe plusieurs formes cliniques (figure 1). Les phlegmons périamygdaliens  Figure 3. TDM du pharynx en coupe coronale : abcès périamygdalien gauche. Ils représentent 30 à 50 % des infections cervicales de l’enfant et intéressent plus fréquemment le grand enfant. Ils résultent en général d’une infection de l’amygdale qui diffuse vers les espaces périamygdaliens, réalisant dans les formes collectées un abcès situé entre la capsule de l’amygdale et le muscle constricteur supérieur du pharynx.  La présentation clinique est typiquement celle d’une angine qui s’aggrave de manière unilatérale, avec une dysphagie qui s’intensifie et peut aller jusqu’à l’aphagie et recrudescence de la fièvre. La douleur est unilatérale avec une fréquente limitation de l’ouverture buccale et une voix modifiée (typiquement voix à type de « patate chaude »). L’examen clinique retrouve un trismus qui rend difficile l’examen de l’oropharynx. Le voile est inflammatoire et oedématié de manière unilatérale, avec une luette souvent déviée de l’autre côté, parfois elle-même oedématiée (figure 2). Les adénopathies cervicales sont fréquemment observées, parfois unilatérales.  Figure 4. Drainage chirurgical du phlegmon périamygdalien. Il peut être difficile d’affirmer le caractère collecté du phlegmon : la ponction à l’aiguille, à l’aplomb de l’oedème, permet, si elle ramène du pus, de confirmer le diagnostic. Mais elle n’est possible sous anesthésie locale que lorsque l’enfant est compliant. Ailleurs, il faut demander une TDM qui permettra de confirmer le diagnostic et de préciser le caractère collecté (figure 3) ou pas du phlegmon périamygdalien.  Le traitement est médicochirurgical. L’hospitalisation est souvent nécessaire du fait de l’importance de la dysphagie. L’antibiothérapie, d’abord en intraveineux, repose sur l’association amoxicilline-acide clavulanique ou l’association céphalosporine de 3e génération + métronidazole ou clindamycine en cas d’allergie.  Figure 5. Abcès rétropharyngé droit : bombement de la paroi pharyngée postérieure droite. Elle est ensuite relayée par l’association amoxicilline-acide clavulanique pendant 1 semaine par voie orale. L’antibiothérapie seule peut suffire dans les formes non collectées. En cas de collection, le drainage chirurgical de l’abcès est réalisé par voie endobuccale (figure 4) sous anesthésie générale (possibilité d’une anesthésie locale chez l’adolescent). La triade fièvre + trismus + aspect inflammatoire unilatéral de l’amygdale fait évoquer un phlegmon périamygdalien. Les abcès rétropharyngés Ces abcès surviennent fréquemment avant 4 ans et correspondent à une infection des ganglions rétropharyngés situés en regard de C2. Ces ganglions régressent en général entre 2 et 5 ans. Chez l’enfant plus grand, ces suppurations peuvent être secondaires à un traumatisme de la paroi pharyngée postérieure (iatrogène ou par corps étranger). Figure 6. TDM du pharynx en coupe axiale : abcès rétropharyngé gauche.  Cliniquement, à la fièvre et à la dysphagie douloureuse s’associent des douleurs cervicales avec torticolis. En cas de dyspnée associée, il faut se méfier de la possibilité d’une épiglottite et examiner l’enfant de façon très prudente. Le diagnostic peut être suspecté par la présence d’une voussure au niveau de la paroi pharyngée postérieure (figure 5). Cet examen est souvent difficile et il faut demander au moindre doute une TDM cervicale et pharyngée qui permettra de confirmer le diagnostic (figure 6), de préciser l’existence ou non d’une collection et de rechercher des complications éventuelles.   Figure 7. Abcès parapharyngé gauche : oedème de la paroi pharyngée pharyngée et cervicale. latérale, amygdale refoulée en avant avec une luette non oedémaciée.  Le traitement est médicochirurgical avec, en cas de collection, un drainage réalisé par voie endobuccale le plus souvent (par voie cervicale externe en cas d’échec de la voie endobuccale) Fièvre + dysphagie douloureuse + torticolis fait évoquer un abcès rétropharyngé. Abcès parapharyngés Ils correspondent à des suppurations intéressant l’espace parapharyngé.  Cliniquement, l’enfant présente de la fièvre, une dysphagie douloureuse, un empâtement cervical, des douleurs cervicales à la mobilisation, voire un trismus.   Figure 8. TDM du pharynx en coupe axiale : abcès parapharyngé gauche. L’examen peut montrer au mieux un oedème de la paroi pharyngée latérale correspondante avec une amygdale refoulée en avant (figure 7). Il peut y avoir un trismus modéré et qui ne s’associe pas à un oedème de la luette. Une tomodensitométrie cervicale et pharyngée doit être demandée, elle permettra ; – de confirmer le diagnostic (figure 8 ) ; – de préciser l’existence ou non d’une collection ; – de rechercher des complications éventuelles.  Le traitement est comparable aux formes rétropharyngées avec intérêt des systèmes de navigation peropératoire par scanner pour aider à la localisation de l’abcès et ainsi son drainage par la voie endobuccale. Fièvre + dysphagie douloureuse + tuméfaction cervicale + oedème de la paroi pharyngée latérale et/ou une amygdale refoulée en avant ± torticolis : évoquer un abcès parapharyngé.   Les complications Elles sont rares. Il peut s’agir de difficultés respiratoires liées au volume de l’abcès ou à l’oedème laryngé associé. Des complications hémorragiques ont été décrites par érosion septique de la carotide. Il peut aussi s’agir de thrombophlébite septique ou aseptique de la jugulaire interne. Une diffusion de l’infection vers le médiastin ainsi qu’un syndrome de Grisel (torticolis fébrile de l’enfant secondaire à une infection naso-pharyngée, parfois rétropharyngée) sont également possibles.   En pratique on retiendra • L’association d’une fièvre et d’une dysphagie douloureuse à un trismus ou à un torticolis doit faire évoquer la possibilité d’une suppuration péripharyngée et faire réaliser une tomodensitométrie du pharynx et du cou. • En absence de trismus ou de torticolis, le contraste entre l’importance de la fièvre et de l’odynophagie avec la pauvreté des signes retrouvés à l’examen de gorge (en l’occurrence examen parfois difficile chez le jeune enfant) doit également faire suspecter une collection plus profonde et faire réaliser une tomodensitométrie pharyngée et cervicale.  

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