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Cardiologie

Publié le 17 juin 2012Lecture 8 min

Stimulation cardiaque de l’enfant

E. VILLAIN, Hôpital Necker Enfants-Malades, Paris
Les enfants ayant un stimulateur cardiaque sont contrôlés régulièrement dans un service spécialisé, mais les médecins qui les suivent doivent s’assurer à chaque consultation du bon fonctionnement du système de stimulation.
Indications de stimulation  Le bloc auriculo-ventriculaire complet (BAVC), sur coeur normal ou pathologique, est la principale indication de stimulation de l’enfant. Les blocs diagnostiqués in utero ou à la naissance (blocs congénitaux) sont presque toujours d’origine immunologique, conséquences du passage transplacentaire d’anticorps maternels anti- SSA et/ou anti-SSB, qui induisent une réaction inflammatoire myocardique foetale, dont le bloc est la séquelle. Les blocs qui apparaissent dans l’enfance sont des affections progressives, débutant souvent par un bloc incomplet, et dont l’étiologie est le plus souvent inconnue, en dehors de rares anomalies héréditaires(1-3). Les indications de stimulation pédiatrique sont bien définies(4), si bien que les complications dramatiques que sont les syncopes et les morts subites sont devenues exceptionnelles. La survenue de symptômes (malaise, défaillance cardiaque, fatigue) constitue une indication de stimulation, de même qu’une dysfonction ventriculaire en échographie. Des études d’évolution spontanée ont montré un risque élevé de syncope et de mort subite quand la fréquence cardiaque s’abaisse au-dessous d’une certaine valeur « seuil ». Les enfants de moins de 1 an dont la fréquence cardiaque est < 55 battements par minute (bpm) doivent être stimulés, ainsi que les enfants plus grands dont la fréquence moyenne est < 50 bpm sur les enregistrements ECG des 24 heures (Holter).  Les blocs postopératoires constituent une autre indication de stimulation cardiaque, puisque tout enfant ayant un BAVC ou un bloc de haut degré se prolongeant au-delà de 7 jours après une intervention de chirurgie cardiaque doit être appareillé(4).  Une défaillance sinusale spontanée ou postopératoire, avec des symptômes ou une fréquence cardiaque très basse, peut rarement nécessiter l’implantation d’un stimulateur.   Principes généraux de stimulation Un stimulateur est une pile au lithium qui établit une différence de potentiel, générant un courant électrique transmis au myocarde par une ou plusieurs sondes. Figure 1. Tracés ECG d’un enfant stimulés en mode VVI-R. De haut en bas, on voit que la fréquence ventriculaire s’accélère avec l’activité physique, chaque complexe QRS stimulé étant précédé d’un spike bien visible. Le rythme sinusal reste dissocié, puisque le mode de stimulation ne concerne pas les oreillettes.  L’impédance, en Ohms (Ω), exprime la résistance dynamique s’opposant au flux électrique. L’impédance de la sonde reflète l’état de la sonde et de son isolant ; l’impédance de la pile indique son niveau d’usure.  Le seuil de stimulation (ou seuil de capture), en règle exprimé en amplitude (Volts : V), est le plus faible stimulus électrique capable d’engendrer une activation cardiaque. Pour une impulsion qui dure 0,5 ms, le seuil de stimulation doit être idéalement ≤ 1 V aussi bien dans l’oreillette que dans le ventricule. Quand l’élévation du seuil de stimulation dépasse l’énergie maximale que peut délivrer le stimulateur, on parle de « bloc de sortie ».  La sensibilité, exprimée en millivolts (mV), définit la capacité de détection par le stimulateur des signaux cardiaques transmis par la sonde. Ces données figurent, en principe, sur les comptes rendus adressés aux parents et au médecin habituel de l’enfant. Chez les enfants pesant moins de 10-15 kg, les stimulateurs sont implantés par voie chirurgicale ; les électrodes sont suturées à la surface du coeur et les sondes sont raccordées au pacemaker implanté dans l’abdomen. Chez l’enfant plus grand, on introduit les sondes par voie veineuse : les électrodes sont vissées dans le myocarde, et les sondes raccordées au pacemaker, inséré entre la peau et le muscle pectoral (5).  Les modes de stimulation sont classés selon un code qui permet de comprendre instantanément le fonctionnement global d’un stimulateur. • La première lettre du code désigne le site de stimulation : atrial (A), ventriculaire (V), les deux (D). • La deuxième lettre désigne le site de détection : atrial (A), ventriculaire (V), les deux (D). • La troisième lettre désigne le mode de réponse du stimulateur à la détection d’une activité électrique endogène : inhibition de la stimulation (I), stimulation (T pour triggering), les deux (D). • La quatrième lettre R (comme rate-responsive) désigne l’asservissement de fréquence, très utilisé chez les enfants ; dans cette option, la fréquence de stimulation augmente à l’effort, grâce aux informations fournies par un capteur intégré au stimulateur. Ainsi, un stimulateur « simple chambre » VVI stimule le ventricule, détecte l’activité électrique ventriculaire et est inhibé par les QRS détectés (extrasystoles par exemple). Figure 2. Tracés en mode DDD. En haut : au repos, stimulation atriale intermittente (*) suivie d’une stimulation ventriculaire. Au milieu : détection des ondes P, chacune étant suivie par un complexe QRS stimulé. En bas : le rythme atrial est trop rapide (FC max du stimulateur réglé à 150 bpm) et les ondes P ne sont donc pas toutes suivies d’un complexe QRS stimulé. Un stimulateur VVI-R a les mêmes propriétés, avec en plus, une accélération de la fréquence à l’effort (figure 1). Un stimulateur « double chambre » DDD peut stimuler oreillette et ventricule, détecter leur activité électrique spontanée, et être déclenché ou inhibé dans l’une et/ou l’autre des deux cavités. Chez les enfants en bloc, un tel stimulateur fonctionne le plus souvent en détectant l’activité sinusale normale et en stimulant le ventricule (figure 2). Enfin, un stimulateur « simple chambre » programmé en mode AAI peut être implanté chez les enfants ayant une défaillance sinusale isolée, avec une conduction auriculoventriculaire conservée.   Surveillance des enfants stimulés Une consultation spécialisée est réalisée tous les 6 mois. On vérifie la charge de la batterie, ainsi que les seuils et le rythme sousjacent du patient. Les enfants sont autorisés à mener une vie normale et seuls les sports violents sont déconseillés. Quand on voit un enfant ayant un pacemaker, il faut impérativement connaître ses antécédents et le mode de fonctionnement du stimulateur. Ces données figurent sur le carnet de stimulation et/ou les courriers.   Symptômes éventuels Tout symptôme, fatigue inexpliquée, malaise (a fortiori syncope), palpitations, doit faire contacter le centre de stimulation où est suivi l’enfant. En cas de pics fébriles ou de fièvre prolongée et inexpliquée, il ne faut jamais prescrire une antibiothérapie à l’aveugle pour ne pas décapiter une endocardite débutante sur sonde.   Examen clinique d’un patient électrostimulé L’examen local permet de s’assurer qu'il n'y a pas de signe local d’inflammation ; on vérifie qu'il n'y pas d'érosion cutanée ni de menace d’extériorisation du stimulateur. La surveillance de la fréquence cardiaque est l’élément clé de l’examen : • En mode VVI-R, la fréquence cardiaque est comprise entre la fréquence minimale et la fréquence maximale programmées ; comme la consultation se fait au repos, elle est en règle générale proche de la fréquence minimale. Figure 3. ECG d’un enfant avec « bloc de sortie ». On voit les spikes (très visibles car on a programmé une amplitude de sortie maximale) non suivis de complexes QRS. Le rythme spontané de l’enfant est < 50 bpm, en bloc complet. • En mode DDD, la fréquence cardiaque est comprise entre la fréquence minimale programmée (indiquée sur le carnet) et la fréquence maximale, pilotée par le sinus et donc variable avec l’activité. Chez un enfant très agité et selon la fréquence maximale programmée, le rythme cardiaque peut devenir irrégulier si le stimulateur ne suit plus toutes les ondes P (figure 2). Lorsque l’on trouve une fréquence cardiaque inférieure à la fréquence minimale programmée de stimulation, il est impératif de prendre contact en urgence avec le centre de stimulation car cela indique un dysfonctionnement du pacemaker.   Électrocardiogramme (ECG) La stimulation ventriculaire se traduit par des « spikes » plus ou moins visibles, suivis immédiatement de l’oreillette et/ou du ventricule stimulé(s). L’absence de « spikes » peut être due à une panne du système d’entraînement ou au fait que la fréquence cardiaque spontanée de l’enfant est supérieure à la fréquence minimale programmée. L’application d’un aimant sur le pacemaker permet de lever le doute, car tous les stimulateurs sous aimant fonctionnent en mode asynchrone (pas de détection des signaux spontanés). L’absence de complexes entraînés suivant les « spikes » indique toujours un défaut de stimulation (figure 3). Si le stimulateur ne fonctionne pas, une radiographie thoracique doit être faite à la recherche d’un déplacement ou d’une rupture de sonde. Que ce soit au cabinet du médecin ou dans un service de pédiatrie, la constatation d’une dysfonctionnement de pacemaker est une urgence, imposant de contacter immédiatement le centre de stimulation où le stimulateur a été implanté, pour organiser le transfert de l’enfant.

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