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Endocrinologie-Diabétologie

Publié le 05 déc 2022Lecture 6 min

Pilosité pubienne précoce : quels diagnostics évoquer ?

Audrey CARTAULT, Charlotte GARCZYNSKI, Thomas EDOUARD, Service pédiatrie, endocrinologie, génétique et gynécologie médicale, Pôle enfants, hôpital des enfants, Toulouse

L’apparition précoce d’une pilosité pubienne peut constituer un motif d’inquiétude parentale. Elle est le plus souvent liée à un processus de maturation surrénalienne précoce non pathologique. Il est toutefois indispensable d’éliminer une pathologie surrénalienne ou gonadique nécessitant une prise en charge spécifique.

Quelques définitions Puberté : c’est l’ensemble des phénomènes de maturation, somatiques et psychiques, qui amènent l’enfant à l’état adulte et conduit à l’acquisition de la fonction de reproduction. Elle se développe à la suite de l’activation de l’axe hypothalamo-hypophyso-gonadique. Pubarche : c’est l’apparition de la pilosité pubienne chez l’enfant. Elle apparaît généralement après les premiers signes pubertaires. Adrénarche : c’est un processus normal de maturation surrénalienne. Elle débute pendant l’enfance, en général entre 6 et 8 ans. Les surrénales secrètent des androgènes, notamment de la testostérone et du sulfate de déhydroépiandrostérone (SDHEA), qui contribuent au développement de la pilosité pubienne et des glandes sébacées. Prémature pubarche : c’est l’apparition précoce d’une pilosité pubienne avant 8 ans chez la fille et 9 ans chez le garçon (figure 1). Figure 1. Âge et chronologie des signes pubertaires (adapté de Pienkowski C, Lorenzini F, Grandjean S, Tauber M. La puberté avant l’âge. 2005). Puberté précoce La puberté précoce centrale est définie par un démarrage de la puberté avant 8 ans chez la fille et avant 9 ans chez le garçon. Elle est due à l’activation précoce de l’axe hypothalamo-hypophyso-gonadique. Le premier signe de développement pubertaire est l’apparition d’un développement mammaire chez la fille et d’une augmentation du volume testiculaire chez le garçon, secondairement associé au développement d’une pilosité pubienne. On observe également une accélération de la vitesse de croissance. En cas de pilosité pubienne isolée ou précédent les signes, on doit évoquer une hyperandrogénie, notamment d’origine surrénalienne. Les examens complémentaires permettant de confirmer la présence d’un démarrage pubertaire d’origine centrale sont : une avance d’âge osseux ; des taux d’œstradiol ou de testostérone augmentés de façon variable ; un taux de gonadotrophines LH et FSH augmenté lors d’un test de stimulation au GnRH (avec pic de LH > 5 et pic de LH > pic de FSH) qui confirment le caractère central de la puberté ;  une échographie pelvienne retrouvant un volume ovarien généralement > 2 ml, un utérus modifié avec apparition d’un renflement fundique et d’une ligne de vacuité, une hauteur utérine > 35 mm. Un traitement par analogue du GnRH permettra de mettre au repos l’axe hypophyso-gonadique et d’empêcher l’évolution des signes pubertaires. La puberté précoce est marquée par un développement des seins avant l’âge de 8 ans chez la fille et une augmentation du volume testiculaire avant l’âge de 9 ans chez le garçon. Prémature adrénarche Le développement de la pilosité pubienne sous l’effet des androgènes surrénaliens est indépendant des gonadotrophines. Si la pilosité est isolée, il ne s’agit pas d’un démarrage central de la puberté. La présence d’une pilosité axillaire, d’une acné précoce ou de sueurs plus odorantes sont également des signes cliniques d’adrénarche. L’adrénarche précoce est considérée comme une variante de la normale. Elle représente plus de 90 % des cas de prémature pubarche. Elle est plus fréquente chez la fille, en cas de petit poids de naissance, de surpoids ou d’obésité dans l’enfance. L’accélération de la vitesse de croissance reste modérée et l’avance d’âge osseux est < 2 ans. La SDHEA est un bon marqueur diagnostic (figure 2), avec un taux modérément augmenté correspondant au taux attendu du stade 2 de Tanner (400 à 1 300 ng/ml ou 1 085 à 3 528 nmol/l). Figure 2. Stéroïdogenèse (adapté de Han et al. Nat Rev 2014.) Il n’y a pas de traitement spécifique à mettre en place dans ce contexte. Une surveillance clinique simple est préconisée. Une adrénarche précoce est plus fréquemment associée à l’apparition d’obésité, d’hyperinsulinisme et d’hyperandrogénie à l’âge adulte. En cas d’apparition d’une pilosité pubienne ou axillaire isolée, l’analyse de la courbe de croissance est indispensable afin de rechercher une accélération de la vitesse de croissance. Hyperplasie congénitale des surrénales (HCS) de forme non classique L’HCS de forme classique est dépistée à la naissance par la réalisation à J3 de vie d’un dosage de la 17-hydroxy-progestérone (17- OHP). C’est une maladie génétique autosomique, récessive, liée à un variant pathogène du gène de la 21-hydroxylase. En France, les formes classiques représentent environ 50 naissances par an (1/10 000 à 1/20 000 naissances). Les formes non classiques ne sont pas identifiées par le dépistage. Leur fréquence est plus élevée : 1/200 à 1/1 000 (figure 3). Figure 3. Les différentes formes cliniques d’hyperplasie congénitale des surrénales (HCS). Le diagnostic peut être fait dans l’enfance devant une prémature pubarche associée à une accélération de la vitesse de croissance avec une avance de la maturation osseuse ou, plus tard, à l’adolescence devant un hirsutisme, une acné ou des troubles des règles. La forme non classique d’HCS est également liée à une atteinte du gène de la 21-hydroxylase mais moins sévère avec une activité enzymatique moins altérée. Le dosage de la 17-OHP de base permet souvent d’évoquer le diagnostic. Une 17-OHP < 6 nmol/l (< 2 ng/ml) exclu très probablement le diagnostic d’HCS. Une 17- OHP > 45 nmol/l signe le diagnostic. En cas de taux intermédiaire, un test de stimulation par l’ACTH (test au synacthène) sera nécessaire et l’analyse génétique du gène de la 21- hydroxylase permettra de conclure. En 2012, Oettingen et coll. ont publié une étude comparant 122 patients avec une prémature adrénarche et 11 patients avec une forme non classique d’HCS. Les critères évocateurs d’une forme non classique d’HCS était principalement une avance d’âge osseux et des taux élevés de 17- OHP et de SDHEA. Les taux de testostérone et delta-4-androstènedione n’étaient pas différents entre les deux groupes. La forme non classique d’HCS est l’un des principaux diagnostics différentiels de la prémature adrénarche à rechercher en réalisant le dosage du taux de 17-OHP. Tumeur virilisante En cas de prémature pubarche, il est nécessaire de rechercher des signes cliniques de virilisation associée : hirsutisme, acné, raucité de la voix, hypertrophie clitoridienne voire métrorragies, dont la présence doit faire évoquer une tumeur sécrétante d’origine ovarienne ou surrénalienne. Dans ce contexte, l’évolutivité des signes de virilisation est généralement rapide. Certains de ces signes sont irréversibles : raucité de la voix et hypertrophie du clitoris si celle-ci est importante. Lors d’un syndrome de Cushing, il existe souvent des signes cliniques d’hypercorticisme, avec une prise de poids et un ralentissement de la vitesse de croissance. Les cas pédiatriques sont très rares. Il s’agit de lésions bénignes hypophysaires ou surrénaliennes. Le cortico-surrénalome est une tumeur maligne du cortex surrénalien rare qui représente 0,2 % des tumeurs malignes de l’enfant. Il est plus fréquent chez la fille, le plus souvent avant 4 ans. Le tableau clinique est bruyant ce qui permet généralement un diagnostic précoce. Le traitement est chirurgical par un chirurgien entraîné. Du fait de la rareté de ce type de tumeur, on recherchera un syndrome génétique de prédisposition tumorale (syndrome de Wiedemann-Beckwith, syndrome de Li-Fraumeni). Il existe différents types de tumeurs ovariennes sécrétantes. Les tumeurs des cellules de la granulosa sont rares : 5 % des tumeurs ovariennes pédiatriques. Ce sont des tumeurs malignes des cordons sexuels à envahissement local. Elles secrètent des androgènes de l’hormone antimüllérienne et de l’inhibine. La prise en charge est chirurgicale par un chirurgien entraîné. Les tumeurs à cellules de Sertoli-Leydig restent également très rares. On recherchera là aussi un syndrome de prédisposition tumorale type DICER 1. Le pronostic de ces tumeurs de l’enfant est globalement bon si le diagnostic est précoce. Devant une prémature pubarche, l’examen clinique doit rechercher des signes de virilisation : hirsutisme, acné, hypertrophie clitoridienne, raucité de la voix faisant suspecter une tumeur sécrétante d’origine ovarienne ou surrénalienne.

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