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Apprentissages

Publié le 23 juin 2022Lecture 7 min

Troubles dys - Orienter efficacement pour une meilleure prise en charge

Sarah DUCROCQ, Groupe hospitalier Nord-Essonnes, Longjumeau

Les troubles « dys » sont identifiables chez l’enfant scolarisé. Ils touchent 1 à 2 enfants par classe et 40 % des enfants dys ont plusieurs troubles associés. Il s’agit d’un véritable problème de santé publique. Le diagnostic est une urgence, car la réussite scolaire en dépend et le pronostic est amélioré par une prise en charge précoce. La HAS définit une organisation sur 3 niveaux, et le niveau 1, « de proximité », correspond au diagnostic, à la prise en charge et au suivi des troubles par le médecin et le rééducateur. Le pédiatre peut donc être un acteur du diagnostic.

Quelles alertes ? Les alertes peuvent venir de l’enseignant qui constate des compétences en décalage avec l’âge, un comportement inadapté ; des parents qui trouvent que l’enfant ne progresse pas malgré leur aide et le temps passé à travailler ; du médecin qui constate l’absence de langage à 3 ans, une mauvaise concentration ou une mauvaise coordination des gestes à 4 ans, des difficultés à lire ou à compter en CP, une lecture non automatisée en fin de CE1. Le retard simple va s’améliorer alors que les difficultés liées à un trouble vont persister. En l’absence de prise en charge, les difficultés s’aggravent et l’enfant se trouve en situation de handicap avec un risque de découragement, d’anxiété, voire de refus scolaire anxieux. Il faut donc l’orienter dès le signal d’alerte après s’être assuré que l’audition et la vision sont normales. Quel professionnel et pourquoi ? Le neuropsychologue Il fait l’analyse du fonctionnement cognitif par des tests normés et étalonnés. Les bilans réalisables :  évaluation de l’efficience intellectuelle par une échelle du QI (WPPSI IV/ WISC V). Elle permet d’éliminer une déficience (QI < 70) et peut révéler un haut potentiel intellectuel (QI > 130) (figure) ;  évaluation des fonctions attentionnelles et exécutives qui permet de confirmer un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H). L’orthophoniste Sur prescription médicale, il fait un bilan étalonné du langage oral écrit et de la logique mathématique. Il analyse les praxies bucco-faciales, l’articulation, la phonologie, le lexique, la syntaxe, l’expression verbale et la compréhension. L’ordonnance précise le bilan requis puis le nombre de séances de rééducation si nécessaire. L’orthophoniste rédige un compte rendu qui permet au médecin de conclure au diagnostic d’une dyslexie, dysorthographie, dysphasie ou dyscalculie. Le psychomotricien Sur prescription médicale, il évalue la psychomotricité globale. L’anamnèse, l’observation clinique et des tests étalonnés permettent d’identifier les troubles. À l’issue du bilan, le médecin peut conclure à l’existence d’un trouble développemental de la coordination (dyspraxie) et prescrire une rééducation. L’ergothérapeute Sur prescription médicale, il recherche un trouble du geste et analyse le graphisme et l’utilisation des outils scolaires. Le bilan permet au médecin de conclure à l’existence d’une dysgraphie et il peut prescrire une rééducation du geste, voire l’apprentissage de l’utilisation de l’ordinateur. L’orthoptiste On lui demande un bilan orthoptique neurovisuel. Il réalise un bilan oculomoteur et sensoriel évaluant la vision binoculaire, la motricité et la poursuite oculaire, la fixation, les saccades. Il étudie la coordination œil-tête, le parallélisme des axes oculaires et les stratégies d’exploration spatiale. Il permet au médecin de faire le diagnostic d’un trouble neuro-visuel ou d’une dyspraxie neuro-visuelle à rééduquer. Quel professionnel et quelle prise en charge ? Lorsque le médecin part de la plainte, il émet des hypothèses diagnostiques et oriente l’enfant vers le professionnel adapté. Il est recommandé de toujours réaliser un test psychométrique (QI) (tableau). Si l’on suspecte une dysphasie C’est un trouble sévère qui se répercute dans plusieurs domaines d’apprentissage. On demandera un bilan orthophonique du langage oral et écrit et un test psychométrique. La rééducation orthophonique sera intensive, au minimum 2 séances/semaine. Un bilan d’évolution sera fait toutes les 50 séances pour vérifier l’efficacité de la rééducation et son bien-fondé. À l’école, il faudra prévoir un AESH (accompagnant des élèves en situation de handicap) puis une orientation dans une classe ULIS TSL (Trouble spécifique du langage). L’accès au langage écrit doit être favorisé. Si l’on suspecte une dyslexie et/ou dysorthographie On réalisera un bilan orthophonique du langage oral et écrit, et un bilan orthoptique neurovisuel, car un trouble orthoptique peut impacter sur la lecture. À l’école, on pourra demander l’aide d’une AESH puis une orientation en classe ULIS TSL pour le passage au collège. L’enfant a besoin que les textes et consignes lui soient lus et il doit écrire le moins possible (photocopies). Si l’on suspecte une dyscalculie La dyscalculie peut être la conséquence d’un trouble : du langage : l’enfant ne peut maîtriser la comptine numérique ; visuo-spatial qui rend difficile la pose des opérations, la géométrie ; dysexécutif (TDA/H) qui gêne la planification, la résolution de problèmes ; de la motricité (dyspraxie) qui rend difficile la pose des opérations, la géométrie. Il faudra demander un bilan : orthophonique complet ; psychomoteur/ergothérapie ; orthoptique. La rééducation et les adaptations scolaires seront adaptées à la cause. Si l’on suspecte une dyspraxie On orientera vers un bilan psychomoteur ou d’ergothérapie (si atteinte isolée du geste graphique). La dysgraphie étant rarement isolée, on conseille un bilan orthophonique, attentionnel et orthoptique neurovisuel. La rééducation est associée aux adaptations scolaires allant des simples photocopies à l’AESH, voire l’outil informatique. Si l’on suspecte un trouble dysexécutif : TDA/H On fera réaliser un bilan attentionnel et une évaluation orthophonique et/ou psychomotrice si d’autres troubles sont associés et semblent sans rapport avec l’inattention (un enfant TDA/H peut avoir des difficultés liées à l’inattention, mais aussi avoir une réelle dyslexie-dysorthographie). Le neuropsychologue peut proposer une remédiation cognitive ; une rééducation psychomotrice aidera si l’hyperkinésie motrice est gênante. Un traitement médicamenteux par méthylphénidate sera proposé s’il existe des complications telles qu’un trouble oppositionnel avec provocation, un décrochage scolaire, une dépression. Que faire une fois le diagnostic établi ? Il faut annoncer un diagnostic précis et déculpabiliser l’enfant et sa famille. Un plan de soin doit être rédigé qui décrit les axes de prise en charge : types de rééducation et durée ; délais avant de faire un bilan d’évaluation ; si besoin, constitution d’un dossier MDPH pour un AESH et/ou une allocation pour enfant handicapé ou du matériel pédagogique adapté. Un suivi médical est nécessaire pour réévaluer les effets des prises en charge et les adapter aux besoins de l’enfant. On peut proposer un soutien psychologique, orienter les parents vers des associations, leur conseiller des ouvrages à lire. Le médecin demandera un avis à un spécialiste (neuropédiatre, pédiatre spécialisé, pédopsychiatre) ou à un centre de niveau 2 s’il a un doute sur le diagnostic, en l’absence de progrès, s’il existe des troubles multiples ou compliqués. C’est seulement dans les situations très complexes qu’il adressera l’enfant en centre de niveau 3. Les parents devront contacter eux-mêmes le centre et fournir les bilans réalisés. Les délais sont de l’ordre de 18 à 24 mois. Des aménagements scolaires sont à mettre en place La rééducation va réduire le trouble sans le faire disparaître, il faut donc y associer des aménagements afin de contourner le trouble et réduire le handicap. Pour cela, une équipe éducative doit réunir l’enseignant, le directeur, la psychologue scolaire ± le médecin scolaire, les parents, et parfois les rééducateurs de l’enfant. Ils décident des mesures à mettre en place telles qu’un PAP (plan d’accompagnement personnalisé), un AESH ou orienter l’enfant vers un établissement spécialisé (ULIS, EREA). Lors des épreuves d’examen, l’enfant doit bénéficier d’aménagements spécifiques. Conclusion Les troubles dys concernent 1 à 2 enfants par classe et justifient une prise en charge spécifique et urgente qui associe une rééducation et des aménagements scolaires. Le pronostic est meilleur si le diagnostic est précoce et s’il existe une cohésion entre la famille, l’école et les rééducateurs. Le médecin traitant a un rôle crucial dans leur dépistage et devrait les rechercher systématiquement lors d’une consultation avec un enfant scolarisé.

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