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Dermatologie

Publié le 06 fév 2023Lecture 6 min

CPAP 2022 - De la marche atopique aux avancées thérapeutiques

Johan PERSONNIC, Paris

Nathalia Bellon (Necker, Paris) a précisé que les lésions de dermatite atopique (DA) présentent une morphologie et une localisation variables selon l’âge (Weidinger S et coll. Lancet 2016).

Chez le nourrisson, la DA se caractérise par une atteinte symétrique des convexités, du visage, des membres et du tronc. À partir de 1 à 2 ans, elles se localisent plutôt aux plis de flexion. À l’adolescence, les lésions prédominent aux plis, poignets, chevilles et sur le haut du corps (paupières, tête et cou, haut du tronc, épaules et cuir chevelu). En cas d’atteinte chronique des faces palmaires des mains, il faut savoir rechercher un facteur de contact (loisirs, produits nettoyants, allergènes professionnels, etc.). Pour évaluer la sévérité de la DA, différents scores sont disponibles : le SCORAD ou le SCORE EASI. On peut également utiliser les échelles visuelles numériques pour évaluer l’intensité du prurit et la qualité du sommeil. Le score POEM est un score d’auto évaluation qui, à partir de 9, est associée à un contrôle insuffisant de la maladie. La physiopathologie de la DA est multifactorielle (Hello M et coll. Rev Med Interne 2016). Il y a un terrain génétique important avec des mutations touchant une ou plusieurs protéines nécessaires à la fonction barrière de la peau. En Europe, on retrouve fréquemment une mutation de la filaggrine. D’autres protéines peuvent être impliquées, notamment en dehors du continent européen. À ce terrain génétique s’ajoute un facteur immunologique avec hyperactivation de voies inflammatoires, notamment Th2, associée à la surproduction des cytokines IL-4 et IL-13. L’environnement peut aggraver des anomalies de la barrière cutanée et favoriser la survenue d’une DA, notamment les facteurs environnementaux de contacts (loisirs, produits d’hygiène et cosmétiques, etc.). Enfin, la dysbiose au niveau des plaques inflammatoires constatée chez les patients en poussée et liée à une colonisation cutanée à Staphylocoque aureus lors de poussées, joue un rôle important dans la physiopathologie de l’eczéma en entretenant l’inflammation.   Une pathologie hétérogène   Les facteurs de risque de progression de la DA (de sévérité et de durée) et de développement de comorbidités atopiques sont : un âge de début précoce, une histoire d’atopie familiale, la sévérité de la DA, l’existence d’une sensibilisation allergénique, un mode de vie urbain et/ou une mutation de la filaggrine. D’un point de vue phénotypique, on distingue les formes intrinsèques des formes extrinsèques de DA. La forme intrinsèque atteint des patients avec un profil sans atopie personnelle ou familiale, avec des IgE totales normales, avec une DA à début tardif, une barrière cutanée conservée. Ce sont volontiers des filles. Il existe souvent des allergies de contact. Ce profil est associé à un profil cytokinique type Th1, impliquant les cytokines Th1 et Th17/22, comme dans le psoriasis. Dans la forme extrinsèque, les patients sont polysensibilisés, avec des IgE totales élevées, une hyperéosinophilie, des antécédents atopiques personnels et familiaux et, en Europe, souvent des mutations de la filaggrine. Des allergies de contact associées peuvent également être constatées. Ce profil est associé à un profil cytokinique Th2. Dix à 40 % des patients européens atteints de DA ont une perte de fonction de la filaggrine. Toutefois, une baisse de l’expression de la filaggrine n’est pas nécessairement secondaire à une mutation, l’inflammation cutanée peut également engendrer une diminution secondaire de son expression. À l’inverse, une mutation hétérozygote, entraînant une altération de la barrière cutanée, n’est associée à la survenue d’un eczéma que dans 42 % des cas, illustrant ainsi le caractère multifactoriel de la DA. L’altération de l’expression de la filaggrine engendre une déshydratation chronique qui peut s’objectiver par la mesure du TEWL (TransEpidermal Water Loss) évaluant la perte épidermique transcutanée en eau. Cette altération favorise les sensibilisations et la survenue de comorbidités atopiques (asthme, allergies alimentaires, allergies de contact) mais également la survenue de surinfections cutanées bactériennes et herpétiques. Sur le plan clinique, le déficit en filaggrine s’exprime par une xérose importante, une lichénification des plis, une ichtyose vulgaire, une hyperlinéarité palmoplantaire, une augmentation du risque d’eczéma et de comorbidités atopiques. Toutefois, du fait de l’absence de solution thérapeutique spécifique, on ne demandera pas d’analyse génétique en pratique courante. Selon l’âge et l’ethnie (européen, afro-américain ou asiatique), le profil inflammatoire et les facteurs associés à l’altération de la barrière cutanée varient. Par exemple, dans la population européenne, les voies Th2 et Th22 sont particulièrement impliquées et volontiers associées à un profil de DA intrinsèque. Chez les patients d’origine asiatique, la voie Th17 est plus souvent impliquée comme elle l’est également dans le psoriasis. L’atteinte cutanée de la DA dans cette population est donc parfois proche de celle du psoriasis. Toutes les ethnies présentent toutefois une exacerbation de la voie Th2 impliquée dans de multiples pathologies extracutanées telles que l’œsophagite à éosinophile, l’asthme ou la polypose nasosinusienne chez les patients atteints de DA.   Prise en charge de la DA   L’objectif est d’obtenir rapidement une rémission des poussées grâce au traitement d’attaque puis de la maintenir au long cours grâce au traitement d’entretien. Le soin de base est l’hydratation cutanée avec des émollients, d’autant plus que la xérose cutanée est importante. L’éducation thérapeutique est essentielle pour optimiser l’observance thérapeutique. La première cause d’échec de traitement étant la sous-utilisation des dermocorticoïdes, le premier objectif sera la lutte contre la corticophobie. La démonstration d’application de crème est une autre étape importante de l’éducation thérapeutique. Les dermocorticoïdes doivent être systématiques en cas de poussée inflammatoire, quel que soit l’âge. Leur action est triple : antiinflammatoire, immunosuppressive et antimitotique. Ils n’ont pas d’effets systémiques sauf mésusage. En cas d’échec, après correction d’une éventuelle sous-utilisation des dermocorticoïdes, on cherchera des facteurs de non-contrôle comme l’existence de facteurs allergiques de contact. On évoquera une allergie alimentaire non IgE en cas d’atteintes extracutanées associées comme une cassure de croissance staturopondérale. Par exemple, en cas de suspicion d’APLV (allergie aux protéines de lait de vache) non IgE-médiée, on effectuera un test d’éviction-réintroduction sur 1 mois. En cas d’eczéma modéré (SCORAD 25-50) ou récurrent, des séances d’UV médicales peuvent être réalisées à partir de 8 ans. Elles peuvent être utiles pour gérer une poussée sévère. Le tacrolimus en pommade à 0,03 % est indiqué en traitement topique de seconde intention à partir de 2 ans et la forme à 0,1 % à partir de 16 ans. Il est particulièrement utile dans les formes touchant le visage et/ou les paupières. Dans les formes modérées à sévères, chroniques invalidantes avec un retentissement du prurit sur la qualité de vie et/ou un retentissement sur la croissance malgré des quantités importantes de dermocorticoïdes, une hospitalisation peut être nécessaire. On discutera en RCP chez ces patients des traitements systémiques (ex. : le dupilumab à partir de 6 ans, l’upadacitinib à partir de 12 ans). L’arrivée des biothérapies a réduit l’utilisation des immunosuppresseurs hors AMM comme la ciclosporine (en cure courte), le méthotrexate (au long cours), l’azathioprine ou le mycophénolate mofétil. Johan PERSONNIC D’après un symposium organisé par les laboratoires Sanofi lors du CPAP 2022

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