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Dermatologie

Publié le 19 oct 2018Lecture 6 min

Les hyperpigmentations de l’enfant

Monia KOURDA, Hôpital Razi La Manouba, Tunisie

Les hyperpigmentations constituent un motif fréquent de consultation en dermatologie pédiatrique. Nous n’aborderons dans cet article que les hyperpigmentations mélaniques appelées mélanoses, les hyperpigmentations non mélaniques et les nævus seront exclus. Le diagnostic étiologique des hyperpigmentations de l’enfant est difficile car de nombreuses étiologies peuvent être responsables de ce trouble pigmentaire et leur aspect n’est pas toujours typique.

Les hyperpigmentations de l’enfant sont classées cliniquement, selon différents caractères : - acquises ou congénitales (isolée ou syndromique) ; - localisée ou diffuse ; - selon le type d’arrangement des lésions ; - selon leur topographie. L’examen clinique, le recours à la lumière de Wood, l’examen au dermoscope ainsi que l’examen anatomopathologique peuvent être intéressants pour l’enquête étiologique. Les hyperpigmentations les plus fréquentes de l’enfant sont surtout localisées. Les hyperpigmentations classiques Il s’agit d’hyperpigmentations localisées qu’elles soient congénitales ou acquises. Les hyperpigmentations localisées congénitales Elles sont surtout dues aux taches café au lait, aux hyperpigmentations segmentaires ou linéaires et aux mélanoses dermiques. • Les taches café au lait (TCL) Les TCL réalisent des macules ovalaires ou arrondies, de couleur brun clair, uniformes et à limites nettes (figure 1). Leur taille, leur nombre et leur topographie sont variables. Figure 1. Tache café au lait typique. Elles apparaissent à la naissance ou à 1 an. En présence de TCL isolées chez l’enfant, l’éventualité d’une association à une neurofibromatose de type 1 (NF1) se pose. Le diagnostic de NF1 est porté en présence de 2 sur 7 critères (encadré). Les autres atteintes sont d’apparition plus tardive que les TCL : les lentigines, les neurofibromes et les nodules de Lisch apparaissent à 6 ans. Avant la confirmation du diagnostic de NF1, en présence de 4 à 5 TCL isolées chez l’enfant, il faut pratiquer un examen clinique complet associé ou non à des explorations paracliniques : IRM cérébrale (hypersignaux de la substance blanche en T2) et/ou diagnostic moléculaire. D’autres génodermatoses peuvent s’associer à des TCL qui sont généralement atypiques réalisant de grandes plaques à bordure irrégulière (figure 2, tableau 1). Figure 2. Tache café au lait atypique (grande taille et bords irréguliers). • Les hyperpigmentations segmentaires ou linéaires • Mosaïcisme pigmentaire Selon R. Happle, différentes topographies caractérisent le mosaïcisme pigmentaire (figure 3). Figure 3. Topographies évocatrices de mosaïcisme pigmentaire. Type A, B : lignes de Blaschko classiques ; Type C : distribution en damier avec une séparation médiane nette ; Type D : distribution phylloïde. Type E : larges patchs sans sépartion médiane. Type F : latéralisation. Nous présentons ici l’hyperpigmentation nævoïde linéaire et convolutée (spiralée) et l’hyperpigmentation en larges plaques latéralisées. – Hyperpigmentation nævoïde linéaire et convolutée ou spiralée (HPNLC) Généralement observée vers l’âge de 1 an, elle est caractérisée par une hyperpigmentation maculeuse selon les lignes de Blaschko. La disposition des lésions est caractéristique, elle est linéaire, segmentaire ou spiralée avec une démarcation nette par rapport à la ligne médiane (figure 4). Figure 4. Hyperpigmentation nævoïde linéaire et convolutée. Elle peut s’associer à des manifestations extracutanées (neurologiques, musculo-squelettiques et cardiaques). Leur recherche est orientée selon les signes d’appel. – Hyperpigmentation en larges plaques latéralisées Comme son nom l’indique, elle réalise chez l’enfant, une hyperpigmentation en grande plaque unilatérale (figure 5). Figure 5. Mosaïcisme pigmentaire en grande plaque latéralisée. • Hamartome de Becker Congénital ou d’apparition plus tardive, il réalise typiquement, un placard unilatéral pigmenté de l’épaule, à con tour irrégulier. L’aspect devient plus typique à la puberté avec une hyperpilosité en regard (figure 6). Figure 6. Hamartome de Becker. • Les mélanoses dermiques Elles comprennent les taches mongoliques et le nævus d’Ota et d’Ito. • Les taches mongoliques Elles touchent surtout les enfants de phototype foncé ou les asiatiques. Typiquement localisées à la région lombosacrée, elles réalisent de grands placards gris bleuté (figure 7). Présentes à la naissance, elles disparaissent au cours de l’enfance. Des localisations ectopiques aux mem - bres ou des formes multiples peuvent se voir. Les formes étendues et associées à des angiomes plans ou à des troubles de développement doivent faire évoquer respectivement une phacomatose pigmentovasculaire ou une mucopolysaccharidose. Figure 7. Tache mongolique. • Le nævus d’Ota et d’Ito Leur appellation est incorrecte car il ne s’agit pas de nævus mais de mélanose dermique. Le nævus d’Ota réalise un placard hyperpigmenté, gris bleuté, unilatéral de la région malaire et nasale (figure 8). Il peut s’associer à une mélanose oculaire (figure 9) et atteint surtout les asiatiques. Figure 8. Nævus d’Ota. Figure 9. Nævus d’Ota (atteinte oculaire). Présent depuis la naissance ou d’apparition plus tardive, il persiste à l’âge adulte. Le nævus d’Ito est une variante topographique du nævus d’Ota, il se localise à l’épaule, à la région sus-claviculaire et, plus rarement, au bras ou au dos (figure 10). Figure 10. Nævus d’Ito. Les hyperpigmentations localisées acquises On distingue les éphélides, les lentigos et les hyperpigmentations postinflammatoires. • Les éphélides Les éphélides ou taches de rousseur réalisent de petites ma cules, rondes, de couleur brun clair. Elles se localisent aux parties découvertes (figure 11). Elles apparaissent et se multiplient sous l’action du soleil chez les sujets de phototype clair et deviennent plus claires en hiver. Figure 11. Éphélides. • Les lentigos Il s’agit de petites macules pigmentées, plus foncées que les éphélides, de siège ubiquitaire (figure 12). Elles sont favorisées par des expositions solaires intenses mais ne s’atténuent pas en hiver, ailleurs apparaissent après PUVAthérapie. Certaines formes diffuses ou de localisations péri-orificielles ou palmoplantaires doivent faire rechercher des génodermatoses (tableau 2). Figure 12. Lentigines. • Les hyperpigmentations postinflammatoires Comme chez les adultes, elles sont secondaires à un processus inflammatoire, quelle que soit son origine (dermatose, traumatisme, plaie ou acte) (figure 13). L’interrogatoire permet de porter le diagnostic. Les hyperpigmentations post-inflammatoires touchent surtout les enfants de phototype foncé. Figure 13. Hyperpigmentation postinflammatoire. Les autres hyperpigmentations Plus rares que les formes classiques, elles sont localisées ou diffuses, congénitales ou acquises et d’étiologie pas toujours connue. Nous aborderons ici la pigmentation maculeuse éruptive idiopathique de Degos, la dermatose cendrée, la dyschromatose universelle héréditaire et la dermatose « en terre sèche ». La pigmentation maculeuse éruptive idiopathique de Degos Elle est acquise et comme son nom l’indique, d’étiologie inconnue, touchant l’enfant. Elle réalise des macules brunes, asymptomatiques, non confluentes, de petite taille, rondes ou de forme digitiforme du tronc, du cou et de la racine des membres (figure 14). Figure 14. Pigmentation maculeuse éruptive idiopathique de Degos. La dermatose cendrée Elle est parfois confondue avec la pigmentation maculeuse éruptive idiopathique de Degos, elle se distingue par la couleur grise des macules (cendrée) qui sont parfois cernées par une bordure érythémateuse palpable (figure 15). Figure 15. Dermatose cendrée. La dyschromatose universelle héréditaire De transmission autosomique dominante, elle apparaît au cours de l’enfance et touche surtout les enfants japonais mais pas exclusivement. Elle est caractérisée par la présence de macules hypo et hyperpigmentées, généralement étendues, n’épargnant ni les mains ni les pieds (figure 16). Elle est à différencier de la dyschromatose symétrique héréditaire des extrémités (acropigmentation symétrique de Dohi) qui touche les extrémités et dont le gène est différent. Figure 16. Dyschromatose universelle héréditaire. La dermatose « en terre sèche » Elle touche les 2 sexes, sans prédilection de race, apparaissant à tout âge (4 mois à 70 ans) mais se déclarant surtout à l’adolescence. Elle est acquise et se caractérise par des macules hyperpigmentées, brunes ou grises, émiettées, parfois à disposition réticulée. Elle est bilatérale et symétrique, touchant avec prédilection les faces latérales du cou, la région rétro-auriculaire et rétro-malléolaire (figure 17). Confondue à de la crasse, elle résiste paradoxalement à une toilette quotidienne parfois agressive. Elle s’estompe à l’alcool isopropylique à 70 % ou à l’éther. Le retentissement psychologique peut être très important. Figure 17. Dermatose en « terre sèche ». ​​​​​​​

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