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Néonatologie

Publié le 09 avr 2015Lecture 7 min

Hypotonie axiale isolée : patienter ou explorer ?

G. FAVRAIS, Service de réanimation et de médecine néonatale, hôpital Clocheville, CHU de Tours

Lors de l’examen clinique du nouveau-né à la maternité, le pédiatre peut être confronté à une diminution inhabituelle du tonus axial. La constatation d’une hypotonie axiale doit-elle mener à la réalisation d’examens complémentaires immédiats, voire à l’hospitalisation du nouveau-né, ou une surveillance ambulatoire de l’enfant est-elle possible pour juger de son évolution ? Plusieurs critères cliniques permettront de trancher entre ces deux attitudes : confirmer la réalité et la persistance de l’hypotonie axiale ; rechercher des signes associés neurologiques et des autres appareils ; identifier des signes de gravité pouvant compromettre la vie de l’enfant à court ou moyen terme.

Diagnostic de l’hypotonie axiale Le tonus axial doit être évalué de manière systématique lors de l’examen pédiatrique en maternité. Son évaluation repose sur des manœuvres, telles que le tiré-assis, la suspension ventrale et le redressement. • La manœuvre du tiré-assis consiste à observer la position de la tête par rapport au tronc lorsque l’examinateur assoit l’enfant. Physiologiquement, la tête suit l’axe du tronc lors de la montée, tient brièvement lors du passage de l’axe, et tombe en avant. Dans le plan frontal, la tête doit rester alignée avec l’axe du tronc et ne doit pas « rouler » sur les épaules. Dans un deuxième temps, le mouvement inverse est réalisé en rallongeant l’enfant qui doit retenir sa tête lors de la descente. • La suspension ventrale consiste à soulever l’enfant en décubitus ventral. Physiologiquement, l’axe du tronc est en rectitude, parallèle au plan de l’examen. Les membres sont fléchis. La tête est dans l’axe du tronc. En cas d’hypotonie axiale, surtout lorsque celle-ci est importante, le corps de l’enfant forme un U inversé autour de la main de l’examinateur. La manœuvre du redressement se manifeste par un mouvement de redressement global de l’enfant lors de la stimulation plantaire en suspension axiale. L’exécution inhabituelle de ces trois manœuvres est en faveur d’une anomalie de tonus qu’il conviendra de confirmer par un second examen. En effet, le tonus peut varier au cours de la journée selon l’état d’éveil et de satiété, et peut être diminué chez le nouveau-né prématuré.   Caractérisation de l’hypotonie Devant une hypotonie axiale, un examen neurologique complet doit être réalisé afin d’évaluer la sévérité de l’hypotonie et, dans la mesure du possible, de déterminer son caractère central ou périphérique. Ainsi, la position et la mobilité spontanée de l’enfant sur le plan de l’examen, la mimique, la force du cri, la qualité de la succion et de la déglutition, le contact et le suivi oculaire, l’évaluation du tonus passif et de la force musculaire sont autant d’éléments à rechercher (tableau 1).     Signes de gravité Trois situations doivent mener à l’hospitalisation immédiate de l’enfant compte tenu du pronostic vital engagé. Il s’agit des situations de détresse neurologique, respiratoire ou de la présence de troubles d’oralité ou de déglutition (tableau 2). Chacune de ces situations doit être précisément évaluée avant de permettre un suivi ambulatoire.     Contexte de survenue et recherche de signes associés Cette étape est importante car elle permet d’orienter le diagnostic et la prise en charge. Les parents sont interrogés sur les antécédents familiaux et la présence d’une consanguinité. Le déroulement de la grossesse est détaillé. La présence d’un hydramnios, symptomatique de troubles de déglutition du fœtus, ainsi que la qualité des mouvements actifs fœtaux sont recherchés. On s’intéresse également à la prise de toxiques par la mère (alcool, anxiolytiques) et à toutes les pathologies présentes au cours de la grossesse comme un diabète ou une dysthyroïdie. Les sérologies maternelles sont vérifiées dans l’hypothèse d’une embryofœtopathie. Le dossier d’accouchement est également examiné à la recherche d’éléments évocateurs d’asphyxie périnatale (anomalies du rythme cardiaque fœtal, complications obstétricales à type d’anomalies du cordon ombilical ou d’extraction instrumentale, pH au cordon, mauvaise adaptation à la vie extra-utérine) ou de critères compatibles avec une infection materno-fœtale (prélèvement vaginal, rupture prématurée des membranes, fièvre maternelle). À l’examen clinique, les anomalies de fermeture du tube neural, une macro- ou microcéphalie, une cryptorchidie, ainsi que les caractéristiques dysmorphiques sont recherchées. D’autres éléments tels qu’un ictère, une hépatomégalie, des signes d’insuffisance cardiaque nécessitent des explorations complémentaires et une prise en charge adaptée.   Étiologies des hypotonies néonatales Les atteintes du système nerveux central (SNC) sont responsables de près de deux tiers des cas d’hypo tonie néonatale, le dernier tiers se partageant entre les atteintes du système nerveux périphérique et les hypotonies d’origine indéterminée (figure 1).   Figure 1. Répartition des hypotonies néonatales selon leur origine.   Les étiologies les plus fréquemment rapportées sont les atteintes lésionnelles du SNC, telles que les encéphalopathies anoxo-ischémiques ou les hémorragies représentant à elles-seules prés d’un tiers des hypotonies néonatales de toutes origines confondues. Les maladies d’origine génétique, dominées par la trisomie 21 et le syndrome de Prader-Willi, arrivent en seconde position suivies par les hypotonies liées aux malformations cérébrales. Les étiologies les plus fréquemment associées aux hypotonies néonatales d’origine purement périphérique sont l’amyotrophie spinale et les dystrophies myotoniques. Les étiologies responsables d’hypotonie sont détaillées dans la figure 2.   Figure 2. Étiologies des hypotonies néonatales.   Des cas d’hypotonie néonatale bénigne ont été décrits dans la littérature sans que cette entité clinique ne soit actuellement réellement objectivée. Il s’agit d’une hypotonie globale maximale lors des mouvements antigravitaires, sans atteinte cognitive, responsable d’un retard des acquisitions motrices transitoires et d’évolution favorable. La recherche de cas familiaux est un élément orientant. Il s’agit d’un diagnostic d’élimination.   Évolution Le pronostic des hypotonies néonatales de toutes origines confondues est relativement péjoratif. La mortalité avant l’âge de 1 an varie de 10 à 30 % selon les études. Un tiers des enfants ne présente pas d’autonomie de déplacement à 2 ans. Un développement normal à l’âge de 2 ans n’est constaté que dans 6 à 15 % des cas.  L’examen clinique permet d’orienter le diagnostic dans près de la moitié des cas, notamment lorsque l’hypotonie est d’origine centrale. Les examens complémentaires les plus pertinents à l’aide diagnostique sont listés dans le tableau 3.     Ces examens relèvent d’une prise en charge en milieu spécialisé et non pas de la phase de débrouillage lors de la découverte de l’hypotonie. Il est important de souligner que l’âge au diagnostic est variable selon les études avec des moyennes allant d’1 mois et demi à 10 mois et des extrêmes de 0 à 60 mois. Cette donnée illustre la nécessité de suivre ces enfants pour lesquels l’évolution est un élément précieux pour poser le diagnostic. Cependant, près d’un tiers des hypotonies néonatales reste de cause indéterminée.   Attitude pratique en maternité Les deux maître-mots sont de « savoir évaluer » et de « savoir orienter ».  Le premier réflexe est de ne pas négliger une situation d’urgence (tableau 2) ou une étiologie dont la thérapeutique nécessite une prise en charge immédiate comme l’hypoglycémie, l’infection materno-fœtale, l’hyperbilirubinémie, l’encéphalopathie anoxo-ischémique ou l’hypothyroïdie. L’autre élément déterminant est de programmer, après la sortie de maternité, un suivi pédiatrique avec avis spécialisé en informant clairement les parents. En effet, en l’absence de danger imminent pour la santé de l’enfant, un suivi ambulatoire est nécessaire qui, selon l’évolution de l’enfant, permettra une approche diagnostique plus approfondie et l’initiation d’une prise en charge adaptée de rééducation si elle s’avère nécessaire.

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